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Critique de PatriceG


Ca commence pourtant par une fausse note, ce "She" chanté par Aznavour en anglais est horribilis, mort de rire !

L'un habite à Notting Hill, l'autre à Beverly Hills, autant dire que cette fausse note passerait presque inaperçue !

Décidément, les anglais ne font jamais les choses comme les autres. En général c'est le cinéma qui s'inspire de la littérature et non l'inverse, mais on peut comprendre pourquoi ici car le film se ramasse dans un scénario propre au champ d'investigation de la littérature.

On ne va pas trop délirer sur le style anglais et s'attarder sur l'entreprise littéraire de Philip O' Connor qui est manifestement bidon, à défaut de sublimer. Je ne vais pas dire que c'est dommage, car le film après tout se suffit à lui-même et peut garder ce qui a fait son succès sans qu'il soit besoin de le doubler d'un pari livresque fût-il génial. Car, et tel est mon propos, il y a dans ce film des passages délicieux, exquis que l'on pourrait voir dans une anthologie littéraire. Mais avant de décliner cela, il me paraît opportun de parler de l'histoire d'amour entre William Thacker et Anna Scott que tout le monde ne connaît peut-être pas.

C'est un jeune libraire poète qui n'habite pas seul avec maman (pour me racheter d'Aznavour), sentimental, un rien désabusé, avec une mine de chien battu comme me l'a soufflé une bonne amie de Miami Beach, néanmoins plutôt beau garçon, qui partage un appartement avec Spike, un gallois fantasque, excentrique, déluré, tout sauf fou. Il tient boutique à Notting Hill quartier londonien, célèbre pour la touche pastel de ses maisons et le charme désuet qui s'en dégage.

Un jour, alors que William se morfond dans sa librairie de livres de voyage qui n'attire pas grand monde, sauf quelques individus déjantés, désargentés aussi, une star de cinéma débarque dans sa boutique. Scène surréaliste dont le libraire, désarçonné, n'en croit même pas ses yeux.

C'est ainsi que Will rencontre Anna Scott, actrice dont la dont la renommée est mondiale, qu'il adore déjà au cinéma. Il la trouve "merveilleuse", déjà au cinéma.. C'est Will qui raconte son histoire. Quelque chose de mystérieux se passe entre eux, dans la vraie vie cette fois, ce qu'on appelle un coup de foudre. Quand Anna quitte la boutique, Will s'en veut de ne pas avoir été plus entreprenant et pense même qu'il lui a dit des bêtises rédhibitoires .. Il semble avoir raté l'occasion de sa vie d' avoir fait plus ample connaissance avec Anna, celle qu'il voyait en rêve au cinéma, et retombe dans les affres que connaissent des centaines de millions d'autres réduits à admirer la star derrière son écran de téléviseur ou de cinéma. Ainsi va la vie. Cette possibilité de s'extraire de son ennui quotidien à Notting Hill lui tombe dessus comme un coup de massue : l'effet passé de l'illusion est immense, c'est peut-être plus terrible encore que s'il ne l'avait vécu !..

On dit que l'histoire ne se répète jamais deux fois. Ben ici, c'est la chance qui va sourire deux fois à Will : il va revoir un instant plus tard Anna dans son quartier.. et ce sera le prétexte à un des plus beaux baisers du cinéma.

Il va se jouer dès lors entre les deux protagonistes une sonate pour piano et violoncelle sur le fil du rasoir : on penche d'un côté pour un amour destructeur à l'ndroit de Will, de l'autre pour un amour indépassable entre Anna et Will. On a autant de raisons de croire à cet amour que de ne pas y croire.

Spike, le colocataire de Will est témoin de tout ça. Lui il croit en tout cas à cette histoire d'amour merveilleuse qui se tisse entre son pote et Anna, il veut le bonheur de Will, c'est un garçon qui a un très bon fond et pense la même chose pour son ami. Il l'encourage à persévérer, alors que tellement de choses se dressent comme des barrières entre les amoureux, leur situation sociale aux antipodes, Anna l'artiste qui court le monde entier, exposée aux quatre vents, le star-système, aux paparazzis.. Spike se projette à travers son ami, sans trop savoir que son bonheur se construit en même temps : une histoire d'amour se noue entre lui et la soeur de Will, on a l'impression d'y voir des intonations de Lévine et Kitty revisités, tellement cela semble sincère entre eux le jour où la flamme s'affiche. Comme un amour presque platonique.

Qu'est-ce qui va bien pouvoir endiguer tous les parasites qui se dressent sur la route du bonheur pour Anna et Will, si ce n'est la révélation au fil des scènes qu'ils sont profondément amoureux l'un de l'autre d'un amour authentique qu'ils n'avaient jamais rencontré de leur vie ! Et quelques fois, les crises passagères qui poussent l'échéance d'une liaison durable entre eux toujours un peu plus loin, finissent aussi par se justifier à cause du passé redoutable aux effets pervers de la star. Quant à Will, il semble un peu plus brut de décoffrage : de ses deux histoires d'amour ratées, il en a pris son parti..

Les références à l'art sont présentes dans ce film, quand ce n'est pas Henri James que l'un adore, c'est Marc Chagall que l'autre adore ; ces noms semblent là pour gager leur amour sur des valeurs de toujours. L'art, la culture est une joie simple à laquelle ils aspirent, comme la joie simple lorsqu' un garçon rencontre une fille et qu'ils se parlent de choses d'amour.

Alors ma scène littéraire, je l'ai ressentie plusieurs fois dans le film, une fois sûrement qui est à l'origine de mon billet :
Le pote de la bande à Will qui travaille dans la finance, qui depuis "sa puberté" n'a pas rencontré de filles, au moment où Will est encore hésitant sur l'option à prendre pour une vie apaisée, lui dit en aparté :
- Mais elle a dit qu'elle voulait sortir avec toi !
- Oui !
- Ca c'est extra, ça !
- Quoi ?
- Ben en fait à chaque fois qu'une fille dit ce genre de choses, moi je trouve ça génial

Quelques instants après, Will confie ses sentiments : 'Elle (Anna) avait beau être une star .. une fille qui se trouve devant un garçon et puis lui demande de l'aimer". Voilà en quelque sorte le résumé de l'histoire dans sa portion la plus congrue. Au moment où il se dit ces quelques mots, il est en proie à un invincible bonheur. Il va illico presto chausser des bottes de géant pour aller rejoindre sa belle qui évidemment l'attend, bien sûr que Anna l'attend et n'attend que lui !..

Je note que l'écrivain Philip O'Connor n'a pas mentionné cette scène dans son livre. J'au dû rêver alors !

Le jeu des acteurs est éblouissant, sublime, Anna irradie de sa beauté, Will est formidable, les autres rôles sont touchants et le metteur en scène agit en maître.

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