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Critique de Nastie92


Ouvrir un roman de Joyce Carol Oates est tout sauf un geste anodin.
Aucun de ses textes (du moins ceux, nombreux, que j'ai lus jusqu'à présent) n'est banal. Aucun n'est lisse.
Ses écrits ont toujours un sens, un but, même si le chemin pour y parvenir n'est pas toujours rectiligne.

Le thème majeur de Fille noire, fille blanche est annoncé dans le titre de ce livre écrit en 2006, dans lequel deux étudiantes sont amenées à partager une chambre dans la résidence universitaire d'une université prestigieuse.
L'une est noire, l'autre est blanche.
L'une est boursière, l'autre est d'un milieu très aisé.
L'une est très croyante et fille de pasteur, l'autre est profondément athée.
L'une n'a que faire de la politique, l'autre vient d'une famille dans laquelle on croit à « l'amélioration de l'humanité par des moyens sociaux et politiques »
Minette (drôle de prénom !) et Genna sont radicalement différentes.

Joyce Carol Oates n'est jamais manichéenne et dans ce roman, spécialement, elle balade sur une ligne de crête son lecteur qui ne sait pas sur quel pied se tenir.
Tout aurait pu être simple : Minette, gentille étudiante, aurait été victime de racisme tandis que Genna aurait au mieux ignoré, au pire martyrisé, cette colocataire imposée qui n'est pas de son milieu social.
Oui, tout aurait pu être simple... mais simpliste et sans intérêt.

Minette n'est pas franchement sympathique. Elle est capricieuse et imprévisible. C'est elle qui se comporte comme une petite fille gâtée, et non Genna contrairement à ce que l'on pourrait attendre.
Lorsqu'elle est victime d'actes malveillants dont on ne connaît pas l'origine, je me suis presque dit qu'elle le cherchait un peu... avant de culpabiliser aussitôt.
Pire : lorsqu'au fil des pages ces actes se répètent, j'ai fini par me demander si ce n'était pas Minette qui mettait tout en scène... avant de culpabiliser aussitôt.
Joyce Carol Oates m'a mise dans une drôle de position. Une position très inconfortable parce qu'aucune réponse n'a été donnée aux nombreuses interrogations qui ont surgi dans mon esprit.
Mais cet inconfort a été stimulant. C'est lui qui m'a poussée à avancer... et à m'interroger encore.
Non, l'auteur ne donne aucune réponse, ou si réponses il y a, celles-ci sont tellement bien cachées que je ne les ai pas trouvées.
Mais peu importe : l'essentiel est le questionnement.

Fille noire, fille blanche... mais ne peut-on penser que ce qui sépare les deux étudiantes n'est pas la couleur de peau mais tout simplement leur personnalité ? Leur caractère, leur comportement ? Tout ce qui fait l'essence d'un être humain, finalement.
Fille noire, fille blanche... et si le titre était trompeur ? Cela ne m'étonnerait pas de la part de Joyce Carol Oates qui se joue de son lecteur avec brio dans ce livre déconcertant qui me trotte encore dans la tête quelques semaines après sa lecture.

PS : Si ce livre avait été mon premier roman de Joyce Carol Oates, je pense que je ne l'aurais pas aimé.
Là, avec l'habitude des écrits très particuliers de cette grande dame, j'ai sans doute perçu des choses à côté desquelles je serais passée sinon.
Je ne le conseille pas du tout pour découvrir cet auteur. À réserver aux "initiés" !
Merci à latina et Annette55 dont les commentaires m'ont inspiré ce post-scriptum.
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