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Critique de Harricana


« Un précis de reconstruction après l'anéantissement », annonce Véronique Ovaldé dans la préface. Certes, mais la reconstruction reste si fragile. Si Rebecca parvient à propulser son fils dans un meilleur avenir équilibré, elle-même reste meurtrie à jamais et ne parviendra pas à trouver le bonheur.

Il en résulte un puissant récit doux-amer de reconstruction : une volonté farouche de se libérer de la douloureuse histoire familiale, teinté de résignation, voire de tristesse. Autant Nous étions les Mulvaney se termine sur une espèce de happy end, autant la reconstruction de la fille du fossoyeur reste inachevée.

La première partie raconte longuement les blessures originelles de Rebecca et analyse finement leur impact sur la personnalité et les sentiments de la jeune fille. On s'approche d'elle très intimement en prenant la mesure du bagage douloureux avec lequel elle va aborder la vie. L'ultime scène de violence entre Rebecca et Tignor, longue, précise, m'a laissée un peu groggy, et ce fut un soulagement de lire qu'elle parviendra à le quitter pour de bon.

Cependant, dans la deuxième partie, une distance s'instaure, comme si l'on observait la jeune femme de plus loin. le temps semble s'accélérer et le récit s'attache à quelques « arrêts sur image ». Rebecca n'est plus au centre du récit, qui est occupé par la relation avec son fils, brillant pianiste, ainsi que le développement de sa liaison avec Gallagher. Dans cette partie, c'est en filigrane seulement qu'est abordée la douleur de l'enfance de Rebecca/Hazel et ses efforts désespérés pour l'enfouir au plus profond de sa mémoire et de son être. L'auteur procède par suggestion et il faut parfois relire certains passages pour bien en comprendre la portée. Une rencontre avec l'un de ses frères qui la reconnaît dans un parc, pourrait faire basculer le roman vers une fin plus heureuse, mais Rebecca le rejette durement.
A mesure que les années passent, la question de savoir si elle va révéler son lourd secret à son époux et à son fils devient lancinante. A plusieurs reprises, elle lâche des bribes, des allusions, qui semblent la soulager quelque peu, mais sans jamais avoir la force d'aller au bout. Elle restera prisonnière de son histoire et elle ne parviendra pas à trouver le bonheur, malgré la bonté de son époux.
Quant à l'enfant, il devient un pianiste virtuose. La sonate qu'il joue lors d'un concours permettra à Rebecca de libérer enfin ses larmes et son émotion. A ce moment également, j'aurais espéré une bascule salvatrice dans sa trajectoire. Or, elle continue de se sentir seule. Autour d'elle, j'ai senti comme un vide sidéral. Si dans l'épilogue elle parvient finalement à exprimer un « je t'aime » à la cousine retrouvée, Rebecca finira par s'effacer doucement de ce dernier dialogue sans s'être réconciliée avec la vie et avec elle-même.
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