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Critique de mh17


mh17
18 février 2022
J'admire énormément Kenzaburo Oé, né en 1935. L'écrivain révolté et dérangeant mais aussi poète et humaniste ; l'intellectuel engagé contre le nucléaire et le nationalisme mais aussi le père de Hikari, handicapé mental devenu compositeur.

J'ai lu uniquement le discours de réception du prix Nobel 1994 intitulé aussi "Moi, d'un Japon ambigu". Il permet de se faire une idée de son univers en quelques pages limpides. le texte est clair et sobre. Kenzaburo Oé commence par évoquer son enfance au coeur de la forêt sur l'île de Shikoku pendant que la guerre fait rage. La forêt est source d'apaisement. Il lit Les Aventures de Huckleberry Finn et le Merveilleux voyage de Nils Holgerson à travers la Suède. Oé voulait apprendre le langage des oiseaux comme Nils. C'est son fils Hikari, retardé mentalement qui réalisera cette expérience et deviendra compositeur. Depuis l'enfance, Kenzaburo Oé vit donc en littérature. Il se sent plus proche d'un Keats que d'un Kawabata, son compatriote nobélisé en 1968. Celui-ci s'était présenté ainsi : "Moi d'un beau Japon". Oé le respecte mais il prend ses distances avec lui en disant Moi d'un Japon ambigu et en s'exprimant en anglais. Pour Oé le Japon moderne est fondamentalement déchiré depuis 1868 entre l assimilation et le rejet de l'occident, ce qui a conduit le Japon au pire. Les Japonais doivent assumer ce passé en particulier leur rôle d'envahisseur de l'Asie tout en maintenant la part d'ombre difficile à comprendre des occidentaux. A l'ère post-moderne (on est en 94) l'ambivalence est toujours là dans la prospérité économique et l'hyperconsommation, mais aussi dans la contestation du serment de non-belligérance fondateur du Japon de l'après-guerre, il faut être vigilant.
Oé rend hommage à son mentor Kazuo Watanabe, spécialiste de la littérature française de la Renaissance. Au milieu de la dernière guerre et du fanatisme patriotique, il se démenait pour ajouter l'humanisme aux conceptions traditionnelles des japonais quant à la beauté et à la nature. Il a traduit Rabelais en japonais et lui a enseigné le "réalisme grotesque". Enfin Kenzaburo Oé clôt son discours par un touchant retour à la musique d'Hikari.
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