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Citations sur Moi, d'un Japon ambigu (4)

Le style fondamental de ma littérature consiste à partir de faits concrets et autobiographiques pour les rattacher à la société, à l'Etat et au monde.
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Je me considère comme un disciple de Kazuo Watanabé dans ma vie et dans mon œuvre. J’ai reçu son influence définitive sous deux formes. La première concerne la littérature. Sa traduction japonaise de Rabelais m’a déjà enseigné concrètement ce que Mikhaïl Bakhtine a théorisé dans les formules de « réalisme grotesque » ou du « système des images dans la culture comique populaire ». Importance des principes matériels et corporels ; rapport intime entre les éléments cosmiques, sociaux et corporels ; superposition de la mort avec la passion de la régénération ; éclat de rire qui peut renverser la hiérarchie apparente : ces systèmes d’images m’ont ouvert, à moi qui suis né dans une périphérie nommée Japon et, de plus, dans une région périphérique de ce pays, une voie d’expression vers l’universalité, tout en me permettant de rester enraciné dans cette périphérie. Plus tard, cela, au niveau de l’Asie — non pas l’Asie en tant que nouvelle puissance économique dont on fait grand cas en ce moment, mais l’Asie de l’éternelle misère et de la richesse chaotique, comme ensemble de métaphores encore vivantes et familières —, m’a induit à me rapprocher du poète coréen Kim Chi Ha, et des écrivains chinois Zheng Yi et de Mo Yan. Pour moi, l’universalité de la littérature devient possible par de tels liens concrets. J’ai participé à une grève de la faim pour demander la liberté politique de cet excellent poète coréen. Je m’inquiète maintenant du sort des romanciers chinois d’une grande qualité qui, depuis les événements de Tian’anmen, ont perdu la liberté d’expression.
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J’aimerais, si possible, suivre l’exemple de Yeats. Pour la civilisation de mon pays dont la force est reconnue dans le monde, non pas pour sa littérature ou sa philosophie, mais pour sa technologie électronique ou sa production de voitures. Et aussi en tant que ressortissant d’un pays qui, dans un passé récent, à force d’enthousiasme dans la destruction, a piétiné la raison des hommes du pays et des pays voisins. Vivant dans un tel présent, et doté d’un souvenir amer ainsi gravé dans le passé, je ne peux pas unir ma voix à celle de Kawabata pour revendiquer ce Moi, d’un beau Japon. Tout à l’heure, j’ai utilisé le terme de vague pour traduire le aimai de Kawabata. Mais maintenant j’aimerais, en suivant l’exemple de la grande poétesse anglophone Kathleen Raine, qui a écrit à propos de Blake qu’il était « ambigu, mais pas vague »,traduire "aimai" par ambigu, car je voudrais justement dire à mon propos "Moi, d’un Japon ambigu".
D’après moi, le Japon moderne, qui a accompli cent vingt ans de modernisation, depuis sa réouverture, est fondamentalement déchiré entre deux pôles d’ambiguïté. De plus, le romancier que je suis a été profondément entamé par des blessures dues à cette ambiguïté même. Cette ambiguïté, si vigoureuse, si aiguë qu’elle lacère aussi bien l’État que les individus, se révèle de multiples façons au Japon et chez les Japonais. La modernisation s’est assigné comme orientation l’imitation de l’Occident. Pourtant, le Japon se trouve en Asie, et les Japonais ont préservé jalousement leur culture traditionnelle. Ce processus ambigu les a acculés à assumer le rôle d’envahisseurs en Asie. Parallèlement, la culture japonaise moderne qui aurait dû rester entièrement ouverte à l’Occident a maintenu une part d’ombre qui est restée pour toujours incompréhensible ou du moins rétive à toute compréhension de la part des Occidentaux. Et, pour finir, en Asie même, le Japon s’est retrouvé isolé non seulement politiquement, mais socialement et culturellement.
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Vivant dans un tel présent, et doté d'un souvenir amer ainsi gravé dans le passé, je ne peux pas unir ma voix à celle de Kawabata pour revendiquer ce Loi, d'un beau Japon. Tout à l'heure, j'ai utilisé le terme de vague pour traduire le aimai de Kawabata. Mais maintenant j'aimerais, en suivant l'exemple de la grand poétesse anglophone Kathleen Raine, qui a écrit à propos de Blake qu'il était "ambigu, mais pas vague", traduire aimai par ambigu, car je voudrais justement dire à mon propos Moi, d'un Japon ambigu.
D'après moi, le Japon moderne, qui a accompli cent vingt ans de modernisation, depuis sa réouverture, est fondamentalement déchiré entre deux pôles d'ambiguïté. De plus, le romancier que je suis a été profondément entamé par des blessures dues à cette ambiguïté même.
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