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Critique de gerald25747


Alors oui, ''La République du bonheur'', c'est le bonheur.
OGAWA Ito est devenue une grande écrivaine. ''Publique !''
Elle met en scène la vie de Hatoko, libraire de ''La Papeterie Tsubaki''.
Femme humble, feutrée, japonaise, pleine de fleurs de cerisiers et de pruniers.
Elle est une femme engagée dans la littérature, consciente dans la façon de mener ses affaires à Kamakura, petite ville de l'archipel, non loin je crois de Tokyo, en bordure du Pacifique.
Toutefois, et c'est un talent de OGAWA Ito, l'autrice nous emporte dans l'imaginaire, en nous donnant l'impression que son héroïne serait en kimono, petites sandales de bois aux pieds, pinceau de calligraphe à la main fine, délicate, précise dans son geste d'écriture.
Car Hatoko poursuit une activité d'écrivain-calligraphe.
Elle s'est mariée à Mitsurô, dont on ne sait pas vraiment si elle est amoureuse de lui.
Mais la relation s'est établie par le truchement de sa jeune amie, QP, la petite fille de la première épouse décédée de Mitsuro, cabaretier en mal de réussite de son café-entreprise.
Hatoko découvre en compagnie de Mitsurô et de sa fillette les joies d'être mère au sein de cette famille recomposée.
La famille et la reconstruction amoureuse et économique sur un projet de nouveau café sont donc au coeur de ce second livre qui parle d'amour, de partage et de cuisine.
Notre écrivaine publique est une moinesse copiste.
Elle rédige et réalise des lettres d'amour sur commande, des lettres de séparation, de rupture par lassitude dans les couples, des lettres de mise en distance relationnelle, la femme ou l'homme venant lui passer commande de ce travail épistolaire particulier, mais bien japonais, parfois contre son gré, mais toujours fidèlement assumé.
Hatoko écrit et trace, peint, représente à l'aide de pinceaux fins, larges, épais, pointus et à l'encre noire ces lettres qui sont en quelque sorte des faire-parts de pensées, de réflexions et de décisions dans les rapports de couples abîmés par la vie ou préludes à de nouvelles formes d'être à deux, voire plus s'il y a déjà une descendance.
Les alphabets Japonais, que ce soit le Kanji, l'Hiragana, le Katakana ou le Romaji sont déjà en soi des ''signes'' d'une réelle beauté.
La calligraphie est un art.
Hatako est une artiste de la forme et du fond.
Elle écrit un faire-part pour annoncer son propre mariage avec le papa de son amie de six ans.
Le courrier représente en soi la culture japonaise.
Le texte est détaillé, va à l'essentiel, de façon délicate et précieusement raffinée.
Il se peint en noir.
Mais comme chez Soulage, Chagall, Matisse, Balenciaga, il n'est pas noir.
Il est écrit en couleur.
Élégance.
Le papier de crêpe et de riz japonais, beau et fragile, y joue son rôle.
Le timbre dessiné et peint couronne la missive.
On est loin d'une forme de communication écrite raide, à l'allemande, économe, à la néerlandaise, florissante, à l'italienne, banale, à la française, fière, à l'espagnole, orgueilleuse, à la portugaise, économe à la nordique scandinave, ne parlons pas de la communication écrite twitterisée, américaine...
Alors, ce bonheur a pour cadre une ''république'' : c'est Kamakura.
OGAWA Ito nous en présente en tête de livre une carte de la ville dessinée par Shunshun ; on y voit le parcours des personnages qui émaillent l'opus, également illustré de calligraphies de Mitsui Tadahiro.
De part et d'autre de la ligne du Shinkansen et d'une seconde ligne de chemin de fer, plus régionale, des sentiers de randonnées, une forêt de bambous, des plantations de thé, des temples et autels taoïstes, des chats errants, une coopérative, des restaurants, des plats réputés, souvent des pâtisseries, les fameux ''pains qui sourient'' aux haricots rouges, le gâteau hérisson, les crèmes dessert au tofu, les glaces à l'italienne, le ShumaI mousseux de Zebra, et aussi un curry au chinchard pané....
Ce livre propose un art de vivre, de l'attention pour l'autre, une douceur, un réconfort, un espoir.
Un partage dans le délice,
Un délice, non pas de Tokyo, mais de Kamuraka.
Une question me brûle les lèvres et la plume d'un humble calligraphe occidental :
Vous aurai-je donné l'envie de vous délecter en lisant ''La République du Bonheur'' de OGAWA Ito ?

Gérald Drubigny
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