AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de DreamBookeuse


Après avoir lu Qui a peur de la mort ?, adoré Akata Witch et beaucoup apprécié le recueil de nouvelles Kabu Kabu, j'attendais avec grand impatience ce roman-ci, sorte de novella / préquel à son premier roman tout en tendant vers la science-fiction qui semblait s'être effacé au profit de la fantasy dans l'autre récit.

Mon résumé

Phénix est un organisme accéléré, c'est comme ça qu'on appelle les monstruosités comme elle qui atteignent l'âge physique de quarante ans après seulement trois années d'existence. Enfermée dans la Tour 7, soumise, comme tous ses autres camarades, au Grand Oeil, elle n'a jamais ambitionné de sortir de sa prison jusqu'au jour où Saeed, un spéciMen capable d'ingérer du sable, métal et autre rouille, ne meurt. Déterminée à trouver les causes de sa mort, la jeune femme va soudain être confrontée à la recherche irraisonnée des hommes au profit de l'éternité sans éthique et amorale, enfermant, blessant, torturant ses semblables. Des côtes américaines aux rivages du Ghana, entre la mer et le ciel, elle parcourra la terre la rage au ventre, la vengeance au coeur. Des decennies après son éveil, un homme trouvera son Livre et changera, à son tour, la face du monde.

Mon avis

C'est un roman étonnant que nous livre l'autrice, dans un format beaucoup moins dense que Qui a peur de la mort ? et moins sombre également. Pour autant, les thématiques ne sont pas joyeuses et nous oscillons entre dégoût de l'être humain et peur de la protagoniste de cette étrange histoire. Parce que Phénix n'est pas une héroïne, dans ce contre cruel elle pourrait même être la méchante. Et pourtant.

La société dépeinte par l'autrice est étonnamment fade. Bien loin d'un futur apocalyptique, les scientifiques de ce monde ont réussi à obtenir un genre de statu quo avec le climat, bâtissant des tours desquels pendent végétations et écrans géants où publicités et visages s'entremêlent. Bientôt c'est celui de Phénix qu'on verra s'y épanouir. Ces avancées technologiques ne sont dues qu'à une société ayant établi les Tours, sortes de gigantesques laboratoires dédiés à la recherche qu'ils partagent, en partie, à la population. Dire qu'ils ont des SpéciMens ou à quoi servent les Tours, oui, annoncer qu'ils y torturent des enfants, façonnent des êtres aux capacités étonnantes et les avilissent, ça non. L'autrice y délaye alors critiques de la société de consommation, du racisme racisme, questionne l'éthique scientifique, et interroge le bien foncé de la quête de l'éternité.

Tout le long du récit nous les rencontrerons, ces SpéciMens, des qui traversent les murs, des qui mangent du sable, des qui volent de leurs ailes puissantes, des qui ne viennent pas de ce monde. Il y en a de toute sorte mais il n'y a qu'une seule Phénix, qu'une seule femme à brûler de l'intérieur, brûler et renaître de ses cendres. Chacune des étapes qui la mèneront vers la vengeance sera d'ailleurs marquée par cette mort qui défie l'éternité et que les autorités donneraient cher pour la posséder. Au fur et à mesure de ses voyages, le roman se fait récit initiatique alors qu'elle en découvre davantage sur ses pouvoirs, le monde qui l'entoure et sa propre nature. Son Frère et son Amour, se dévoileront également au gré du temps, laissant leur passé ressurgir petit à petit. Tous deux enlevés à leur famille pour des raisons différentes, ils se sentent unis d'une même force et d'un même combat alors que Phénix brûle simplement de colère.

Naïve au début du récit, la spéciMen commence petit à petit à comprendre qu'elle ne sera bien nul part, tant que le Grand Oeil vivra, tant que des êtres comme elle seront retenues des Tours. Commence alors pour elle et les deux hommes de sa vie une quête de tous les instants, faite de violence et de destruction. Mais elle aussi parfois porteuse d'espoir quand elle rencontre des peuples qui la comprennent d'un regard et la protègent, assez étonnante, quasi mystique dans sa relation à l'Epine Dorsale qui traverse son ancienne tour et à la Graine qu'elle plantera dans une autre terre. Certaines choses me sont restées hermétiques, probablement en référence à des mythes nigérians et ghanéens, d'autres m'ont surprises, et on retrouve avec beaucoup de plaisir certaines nouvelles de Kabu Kabu qui trouvent leurs échos dans ce récit.

Cependant, si la rage, la passion, le désir de vengeance de Phénix traversent à merveille, je n'y ai pas retrouvé la même saveurs que dans ses autres romans, une forme d'étirement qui m'a déplu et de boucle qui m'a un peu déstabilisée. Et puis cette forme d'acceptation de tout ce qui l'entoure, à commencer par la forme de vie extraterrestre qu'elle rencontre, et cet ange qui lui enseigne différentes choses m'a semblé un peu facile.

En résumé

Le Livre de Phénix traverse notre bibliothèque en y laissant un sillon brûlant de rage et de vengeance. Comme il est rare d'avoir affaire au méchant d'un siècle futur tout en comprenant avec douleur et passion son désir de brûler et de voir partir le monde en cendre. En partant d'une société gangrénée par la recherche scientifique et la quête d'éternité, l'autrice y délaie des thématiques sombres comme l'éthique scientifiques, le racisme, l'esclavagisme, et les dangers d'un monde sans plus aucun esprit critique. Entravé de quelques facilités scénaristiques, il n'en reste pas moins percutant et s'inscrit avec brio dans l'univers déjà développé par l'autrice à travers Qui a peur de la mort ? et Kabu Kabu.
Lien : https://lesdreamdreamdunebou..
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}