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Critique de Lune


Le livre est beau, relié à l'ancienne.
Couverture noire et solide, ferme sous les doigts.
Un crayon dessine en bas à droite.
Objet noble.
En lettres mouvantes : "Carnets d'Avignon".
Sous-titre : "Planches 2008/2012.
Ouvrir le livre et les yeux plongent dès la première page sur le Cloître Saint-Louis d'un côté et de l'autre, sur la Cour d'honneur du palais des Papes.
Nous sommes le 3 juillet 2008, le jour d'ouverture du festival.
A l'ère du numérique, de la vidéo, du plus loin que le cinéma de nos grands-parents, un crayon a revendiqué son existence au-dessus des technologies envahissantes.
Il s'est blotti dans la main de l'homme amoureux de traits et de théâtre.
Et François Olislaeger nous a livré ses émotions de spectateur et d'artiste lucide et sensible;
Nous voyageons de lieux en lieux. Nous nous asseyons de conférences de presse en rencontres/débats. Nous vibrons de chorégraphies en opéra-théâtre. Nous remuons nos cellules au Théâtre des idées; nos ne savons plus quelle est notre véritable identité devant toutes les interpellations humaines, inhumaines, déshumanisées qui brisent à raison toutes les certitudes.
le statut de l'artiste, c'est quand même la solitude. la solitude contre la masse. la singularité contre le même partout". (Nouveau roman - Christophe honoré).
Nous écoutons des échanges avec le public dont celui qui eut lieu avec Roméo Castellucci qui déclare : "Le théâtre brûle et c'est très beau".
La fièvre de quatre années de festival fait monter notre température tant par la contemporéanité du répertoire que par les dessins suggestifs qui nous plongent dans la quête continuelle des artistes qu'ils soient du verbe, du corps (le "rendu" des chorégraphies de Anne Teresa de Keersmaeker est vertigineux) ou du dessin.
Et quand la différence due au handicap, proposée avec pudeur au public, par Jérôme Bel dans "Disabled Theater" et qu'il nous dit : "Tout le travail a été de ne pas mettre en scène. Enlever des solos, c'était exclure encore à l'intérieur. Quand déjà, il y a exclusion à l'extérieur"..., on mesure toute la nécessité "politique" et de "laboratoire" du théâtre, de même, lorsque Abdelwabab Meddeb témoigne : "J'ai eu le malheur de dire à la télé que j'avais bien ri en voyant "Bienvenue chez les Ch'tis", alors que c'est dangereux, ce communautarisme qui participe du repli sur soi",
Chaque planche de ce livre prouve que nombreux (artistes et spectateurs) sont ceux qui refusent cette appartenance aux "suiveurs" et nombreux sont ceux pour qui le théâtre est un moyen d'outrepasser le banal devenu habitude.
De l'humour aussi : "La Machine à Ecrire à Pomme de Pin" ("permet de recueillir ce qu'écrivent les pommes de pin") est délirant de cette splendeur du pays "d'Absurdie".
Dans le spectacle "Stifters Dinge" - Conception de Heiner Goebbels (Avignon 2008), la voix de Claude Lévi-Strauss s'élève : "Donc l'aventure aujourd'hui est impossible?"
A chacun d'y réfléchir et peut-être d'y répondre en parcourant ces superbes carnets (accessibles sans avoir vu les spectacles) où il suffit de se laisser porter et de permettre à notre perception sensible de s'épanouir dans le bouillonnement des phrases et des croquis.
2012 : 100e anniversaire de la naissance de Jean Vilar : le lieu vit, bruisse, espère, combat.

Merci à Babelio pour cette visite avignonnaise et merci aux Arte Editions/Actes Sud de l'avoir permise.
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