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Critique de BurjBabil


Douze lettres destinés aux jeunes.
Il y a de bons conseils : « Je lui ai répondu que lire les oeuvres majeures, plume à la main, d'un philosophe majeur remplaçait avantageusement le cours magistral d'un enseignant laborieux. ».
Mais qui est ce « lui » auquel ces conseils s'adressent ?
Et bien à « l'un qui me demandait si, en plus de ses études à Sciences Po, il devait s'inscrire en philo ».
Premier paradoxe et pas des moindres pour quelqu'un qui s'est érigé en défenseur (enfin je crois, je n'ai pas suivi toute l'évolution de sa pensée) des gilets jaunes. Et en effet, ces chapitres ne sont pas d'une accessibilité immédiate, comme on aurait été en droit de l'espérer de la part de quelqu'un qui a promu l'université pour tous (et gratuite! ).
L'essentiel du moteur Onfray peut être résumé à ce passage de la lettre 6 :
« L'islamo-gauchisme a pour grand-père le Sartre qui faisait feu de tout bois pourvu que flambe l'Occident judéo-chrétien. »
Associer dans cette seule phrase ces deux expressions apparues dans le grand public au début du vingt-et-unième siècle dénote le glissement sémantique et conceptuel opéré par le médiatique et infatigable commentateur qu'est devenu M. Onfray.
Tout passe à grande vitesse dans la moulinette à penser du philosophe-journaliste qui s'est rendu en Arménie en plein confinement pour faire ce qu'il critique chez M. B. H. Levy qui se rend en Libye pour poser et fabriquer un article de presse... ou chez M. Foucault en Iran:
« il arrive à Téhéran pour faire un travail de journaliste – il fera en effet un travail de journaliste, c'est-à-dire le contraire d'un travail de philosophe… »
Jusqu'à frôler le comique lorsqu'il s'essaye à redorer l'image des dictateurs pour peu qu'ils appartiennent plus ou moins à la sphère du « Judéo-Christianisme » ou de ses vassaux cher à son coeur d'athée sans doute nostalgique repenti.
« le régime du shah n'est bien sûr pas un modèle démocratique, mais il se propose d'occidentaliser, de moderniser, de laïciser, d'industrialiser l'Iran profond qui vit dans un monde traditionnel, coutumier et conservateur. Sa police politique est brutale, son armée tire à vue et fait couler le sang. »...
Lorsqu'il s'aventure sur des sujets scientifiques, là encore il surprend :
« Il existe également un langage des plantes qui communiquent par l'éthanol, ...Conscience, mémoire, souvenir du passé, capacité à se projeter dans l'avenir, volonté de construire un présent, articulation d'un franc langage avec signifiant et signifié : il semble qu'un chêne dispose parfois de plus de vertus que tel ou tel humain… »
Voilà, c'est un essai plein de contradictions, qui voue pas mal d'intellectuels, et pas des moindres (Glissant, Debré, Foucault déjà cité...) aux gémonies, mais qui recèle également quelques pépites intéressantes à creuser et à discuter : .
« En même temps, tout à son bellicisme, le pays participe à toutes les expéditions punitives de la planète, au côté des Américains, depuis des décennies – sauf parenthèse chiraquienne. Afghanistan, Irak, Libye, Mali, Syrie, la France se montre d'autant plus islamophobe dans le monde qu'elle se montre éhontément islamophile sur son territoire ! »
Pour qui roule M. Onfray ? Difficile à dire, pas pour les transhumanistes en tout cas :
« Musk affirme également que ses équipes travaillent à perfectionner l'intelligence artificielle. Pour qui a lu 1984 d'Orwell, on imagine bien que cette « intelligence artificielle » nomme le projet d'un crétinisme artificiel. On voit mal que Musk ait d'autre projet que de réaliser le transhumanisme qui suppose l'abolition de l'homme de l'humanisme au profit d'un univers de microprocesseurs dont la maîtrise lui reviendrait, à lui et aux patrons des GAFAM qui travaillent déjà en ce sens en instaurant une société de contrôle des plus idéologiques »
Finalement, c'est un pamphlet et même si on peut se reconnaître dans certaines critiques des travers de notre société (qui sérieusement peut dire aujourd'hui qu'elle se porte bien ?) cette impression qu'il fait feu de tout bois dans toutes les directions laisse un sentiment bizarre.
Mais c'est brillamment écrit.
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