Le secret de la "science holmésienne" serait-il tout simplement qu'elle est une manifestation les plus tordues de l'humour britannique ?
(extrait de "le monde des holmésiens", chapitre 4 du volume paru aux éditions "Gallimard" en 1997)
Pendant la guerre de 1914, un général français demanda à Conan Doyle si Sherlock Holmes servait dans l'armée britannique. A Istamboul, le gouvernement ottoman s'inquiéta de la présence de Holmes en Turquie comme espion de sa Gracieuse Majesté !
Or nulle part Conan Doyle ne mentionne de casquette à double visière (en anglais deerstalker, littéralement : casquette de chasseur de cerfs). Dans Flamme d'argent, il fait allusion à une casquette de voyage (travel cap). C'est à l'illustrateur du Strand Magazine, Sydney Paget, que revient l'idée de deerstalker qui allait immortaliser le détective.
Un dernier trait de la personnalité de Conan Doyle mérite d'être rappelé : son penchant pour le spiritisme, qui dégénère à la fin de sa vie en une véritable croisade. (...) Conan Doyle a très tôt manifesté sa curiosité pour ces phénomènes et, en 1916, il annonce sa conversion à la cause du spiritisme. Aidé de sa femme Jean, qui joue au médium, il se livre à mille expériences, répand la bonne parole en multipliant livres, articles et conférences dans le monde entier. En 1928, il préside le Congrès spirite international de Londres.
Hélas, il se montre d'une crédulité sans bornes, apportant sa caution aux pires charlatans. Non content de croire aux esprits, il consacre un livre au retour des fées (The Coming of the Fairies, 1922). On est loin de la logique froide et ironique d'un Sherlock Holmes.
Le professeur Joseph Bell, qui enseignait la chirurgie, était réputé pour la fiabilité de ses diagnostics. Mais ceux-ci ne se limitaient pas à la maladie. Bell était capable, à partir d'un détail du comportement, de la démarche ou du vêtement, ou encore d'une callosité de la peau, de deviner l'origine et la profession de ses malades. Conan Doyle eut alors une réflexion dont il ne pouvait imaginer les développements : un détective qui posséderait de tels dons serait imbattable à la chasse aux criminels...
Les spécialistes ont répertorié ces faux Sherlock Holmes qui, dans l'espoir de tromper les lecteurs, furent dénommés Sherlock Ohms, Shamrock Jolnes, Ollock Combs, voire Shylock (!) Homes.
Maurice Leblanc, le créateur d'Arsène Lupin, prit moins de détours. Il publia en 1906, "Sherlock Holmes arrive trop tard", une nouvelle opposant l'anglais redresseur de torts, mais tellement guindé, au français filou, mais tellement sympathique.
Conan Doyle protesta et, quand la nouvelle parut en volume, Sherlock Holmes était devenu Herlock Sholmes.
Leblanc récidiva dans "Arsène Lupin contre Herlock Sholmes" et dans "l'aiguille creuse".
Sans le vouloir, il avait créé un genre, le roman holmésien, et assuré à son rival une descendance romanesque dont Arsène Lupin ne bénéficiera jamais...
(extrait de "l'impossible assassinat", chapitre 2 du volume paru aux éditions "Gallimard" en 1997)
En 1994 , sous les plafonds à caissons de la Law Society de Londres , une grave discussion agita les esprits :Watson portait-il des pyjamas ou une chemise de nuit?