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Citations sur Les déraisons (69)

- Flaubert disait, et j’aime beaucoup Flaubert : « Rien n’est sérieux en ce bas monde que le rire. »
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–Qu’avez-vous fait pendant un an si vous n’alliez plus au bureau Monsieur Bergen ?
–Oh.
Cette question met Adrien en joie.
–Nous dansions, ma femme et moi, Monsieur le juge.
–Vous dansiez ? Vous avez dansé pendant un an ? !
–Quand elle en avait la force physique, acquiesce Adrien.
–Et c’est pour cette raison que vous avez renoncé à aller travailler ?
–Vous en connaissez une meilleure ?
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La pièce est magistrale. Ses murs dressés comme des remparts soutiennent une voûte suspendue à plusieurs mètres du sol, sculptée en éventail et percée d'une imposante lucarne. Par-delà, le ciel dispense sa lumière matinale, une colonie de nuages traverse lentement le tableau. Adrien ne peut s'empêcher de penser que, de là-haut, Louise doit se marrer.
Dans cette salle de justice, l'air en circulation lente a pris la couleur presque jaune des époques antérieures. Depuis la disparition de sa femme, il y a quelques mois, ici ou ailleurs, à tout moment, c'est comme si le présent était déjà ancien. En filant, Louise a emporté les pigments clairs de l'oxygène, elle s'est barrée avec le blanc. La vision d'Adrien a reculé d'un cran sur la palette Pantone. Même les murs de ce tribunal sont devenus légèrement plus foncés. Adrien observe le trône du président, une simple chaise posée derrière un imposant bureau face à l'assemblée. Dans quelques minutes, il va devoir répondre à des questions officielles, trier les mots, les peser, les modérer, les tempérer,…
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Même si je le voulais, je ne saurais pas où aller chercher les larmes. Je pleure pour les autres. Pour moi, j'invente. (p62)
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Depuis plusieurs jours, Adrien avait perdu le sommeil. Il le chercha à bien des endroits, souleva des coussins, fouilla sous les meubles, tria ses affaires sans succès, le repos s’était tiré, avait détalé au plus loin, les alentours d’Adrien étaient vulnérables pour le moment, ses parages enduraient des bombardements de tous côtés, et personne pour lui porter secours. C’était sa Syrie émotionnelle.
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À l’aube, le lendemain, Louise se leva d’un bond, saisit le visage d’Adrien à pleines mains et l’embrassa avec force. Elle fonctionnait parfois avec agressivité, c’était une manière d’imposer aux traces laissées dans son sillage de demeurer vivaces, sa façon maladroite de se rappeler à lui.
Elle annonça une fois debout comme on déclame un poème :
– Aujourd’hui, journée en O !
– Encore?
– Bon dodo?
– Ramollo. Et toi mon angelot?
– Oui ! Excitée par ma première chimio!
Et voilà, malgré la nuit sans fermer l’œil, malgré le poids de l’anxiété, elle le ramassait comme le sucre en poudre dans une petite cuillère, il n’y avait plus qu’à embrayer, c’était presque une obligation morale: on ne laisse personne seul avec une telle quantité de bonne volonté.
– T’es dingo...
Il l’embrassa.
– Je t’accompagne à l’hosto.
Louise se cabra, licorne grognon, gamine indignée.
– Tu vas au bureau!
– No...
– So !
Une heure plus tard, à l’arrêt de bus, Adrien profita des dernières hésitations de la porte pour s’embarquer à bord.
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Elle avait déplacé le centre de gravité des événements, leur avait ôté leur foutu côté obscur. Ne restaient que des bulles de savon sur lesquelles elle soufflait avec une puérilité assumée. Il n’y avait qu’elle pour transformer ainsi le gravier en guimauve.
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Adrien a toujours évité de se poser cette question. Et si Louise n’avait été séduite pas rien chez lui? Peut-être l’a-t-elle aimé pour une raison que si trouve n’en être aucune. Juste parce que l’aimer, c’était pile l’endroit où se trouver, le point entouré sur la carte de Louise, le millimètre carré où s’enfonce la fléchette lancée sur la cible. Ou peut-être l’a-t-elle aimé instinctivement. Sans hiérarchie de pourquoi ou de parce que. À l’animale. On se flaire sans réaliser que, déjà, la chimie opère. La matière de l’un reconnaît celle de l’autre, elles se conviennent à tel point qu’elles veulent fusionner instantanément, lobant par ce système primitif toute forme de réflexion. Ta gueule! Tu penseras plus tard. À l’instant précis du coup de foudre, la dopamine, l’ocytocine, l’adrénaline et la vasopressine insultent copieusement le cerveau.
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À l'état pur, la déraison maintient en équilibre sur un fil invisible. Mieux, elle devient une arme d'une puissance inouïe
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- A ce jour, on recense 8,7 millions d'espèces sur Terre, de type microbien, animal ou végétal. Ce recensement est, vous l'imaginez bien, variable selon les progrès de la recherche : on est à tout moment susceptible de découvrir qu'en réalisé il y en a beaucoup plus. Je travaille depuis vingt ans à observer les animaux, je tente de comprendre leurs comportements pour les anticiper au mieux. Cela, vous l'aurez compris, dans le but de les protéger. Les dangers, les accidents, les maladies sont certes des évènements qui régulent l'équilibre, et ils sont la plupart du temps paradoxalement la meilleure réponse à la survie des espèces : elles demeurent parce qu'elles meurent. Ca marche pour les antilopes, les poissons-chats, les cigognes. Mais ça n'a pas le moindre sens pour vous. Car vous êtes, Louise Olinger, la seule espère au monde qui n'a qu'un seul représentant, vous. Si vous disparaissez, toutes les classes de votre famille s'éteindront dans le même souffle. Et le vide laissé serait abyssal, rien n'y résisterait, ni la faune, ni la flore, ni même l'humanité. Les prés que vous butiniez dépériraient de ne plus fleurir, la savane se consumerait de ne plus vous sentir la courir, les vastes plaines de la pampa se languiraient de vos sabots sur leurs terres fertiles, les eaux glacées de l'Antarctique ne survivraient pas à votre déperdition, si minuscule étiez-vous. Ce que je vais vous dire là, je ne l'ai dit ni aux élans, ni aux rennes, ni aux lions de Tanzanie, ni aux baleines siamoises : vous n'avez pas d'autre choix, madame Olinger, que de survivre. A votre cancer, A votre mère, à votre père. A votre histoire.
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