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Critique de tiptop92


Marcel Pagnol - Marius - 1929 : Une des pièces les plus célèbre du répertoire français marquée à jamais par les acteurs qui l'ont incarnées à l'écran (Raimu, Pierre Fresnay, Orane Domazis). C'est une histoire banale en fait, celle d'un jeune homme partagé entre ses envies de voyages et l'amour qu'il porte à une petite vendeuse de coquillages. C'est cette dualité qui met en émoi leur quartier du vieux port de Marseille. Se joue alors un drame joyeux avec ses personnages truculents et excessifs mais en même temps tellement vrais et sensibles. On rit aux larmes en visualisant certaines scènes mais on pleure aussi car l'émotion est toujours là à fleur de lignes sous le débit des paroles et de l'accent provençal qu'on imagine très bien nous remplir l'oreille. "Marius" est un inégalable chef-d'oeuvre de la rue, évocation de l'amour pur et de l'amitié sans failles qu'on devrait avoir tous lu au moins une fois dans sa vie. Car cette pièce rend heureux, elle insuffle une énergie salutaire et débordante dans nos existences pas toujours amusantes. L'aurions-nous apprécié de la même façon si nous n'avions pas en tête la faconde de ceux qui l'ont incarné à l'écran ? Sans doute car ce texte qu'on pouvait qualifier d'une simplicité biblique renfermait en lui un bouquet d'émotions que les mots seuls pouvaient traduire avec talent. Marcel Pagnol sans faire de rimes fut un merveilleux poète de la vie, un conteur et un dialoguiste hors pair qui sut inventer des personnages immédiatement identifiables à une ville, à une région. On ne pouvait le nier, César dans l'imaginaire collectif était la représentation type du marseillais. Outre l'accent chantant tantôt moqueur, tantôt sérieux qu'on pouvait entendre dans le film, un langage imagé qui sentait bon la méditerranée, une certaine langueur pas du tout monotone et un toupet sans faille renforçaient l'image sympathique des habitants de cette belle ville française. Image bien écornée depuis que les téléréalités ont réussis à ridiculiser les marseillais aussi bien que les ch'tis d'ailleurs. Tout était délectable ici, de la fameuse partie de cartes qui érigeait la tricherie en art («tu me fends le coeur !!») aux répliques savoureuses toutes droites péchées dans les rades étouffants de la citée («Le jour où on fera danser les couillons tu ne seras pas à l'orchestre», «Il est tellement fainéant qu'il ne marche jamais au soleil pour ne pas avoir à tirer son ombre»). Pagnol avait le sens du populaire et non du populisme. Ses personnages n'étaient pas spécialement privilégiés mais ils vivaient des existences heureuses sans Netflix, sans portables et sans réseaux sociaux (Et oui c'était possible…). La gaieté était toujours là à fleur de peau même quand le désespoir et la tristesse venait saisir les protagonistes de la pièce qui vivaient alors les drames avec le masque grave des tragédiens antiques et le coeur des jeunes enfants qui ne pensent jamais que le mal peut durer. «Marius» menait au panthéon du théâtre et de l'écriture des personnages que chacun aurait pu rencontrer dans sa vie à condition d'être né soit même à l'ombre de la bonne mère. Panisse, Honorine, Monsieur Brun, le capitaine Escartefigue enrichissaient eux aussi un folklore qui entre la bouillabaisse, les santons et le pastis disposaient déjà de tous les marqueurs qui font qu'on aime en France une ville ou une région. Cette oeuvre n'est pas longue à lire mais elle dépasse en émotion bien des sagas régionales qui tentent en plusieurs volumes de nous faire rentrer de force dans une ambiance que leurs auteurs ne maitrisent pas toujours… beau à pleurer
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