Citations sur Ma soeur la vie et autres poèmes (47)
DÉFINITION DE LA POÉSIE
C’est un bruit de glaçons écrasés, c’est un cri,
Sa strideur qui s’accroît et qui monte,
C’est la feuille où frémit le frisson de la nuit,
Ce sont deux rossignols qui s’affrontent,
C’est la suave touffeur d’une rame de pois,
L’univers larmoyant dans ses cosses,
Le jardin potager où Figaro s’abat
En grêlons du pupitre et des flûtes.
C’est cela qu’à tout prix retenir veut la nuit
Dans les fonds ténébreux des baignades
Pour porter une étoile au vivier dans les plis
De ses paumes mouillées, frissonnantes.
On étouffe, plus plat que les planches sur l’eau,
Et le ciel est enfoui sous une aune.
Il siérait aux étoiles de rire aux éclats,
Mais quel trou retiré que ce monde !
En vers tracés comme un jardin
Vibrant des veines
Des tilleuls fleuris un à un
En file indienne.
J'y mettrais la senteur des roses
Et de la menthe
Les prés, la fenaison, l'orage,
Au loin qui gronde.
Alors je m'éveillai. L'aube avait la grisaille
De l'automne, et le vent emportait sur son aile,
Comme un chariot que suit une averse de paille,
Les bouleaux alignés qui couraient sur le ciel.
Lentement, patineur, lentement glisse
Coupant chaque pas, chaque fois en hauteur.
A chaque tournant, le patin qui crisse
Se fiche, étoilé, dans le ciel du Nord.
L'orage est là, dans la maison !
Changeant de visage, en furie,
Il court le long des galeries,
Argenté, grondant, à tâtons.
Tu es proche autant qu’on peut l’etre.
Ta présence est comme une ville,
C’est Kiev tranquille à la fenêtre,
Enveloppé de jour torride.
Kiev qui paraît dormir, mais en
Faisant à son sommeil la nique,
Et qui, tordant son cou suant,
Rejette son collier de briques.
Kiev où sur la chaussée vaincue
Des peuples de peupliers las
Ont toutes leurs feuilles qui suent
De tant d’obstacles jetés bas.
Tu es la pensée que ce fleuve
Dans la peau verte des ravins
Est pour nous le livre des preuves
De secrets affronts souterrains.
Ta présence est comme un appel
À prendre place à ce midi
Pour — lui relu de Á à Z —
Y inscrire : « Elle fut ici. »
Ma beauté, toute ta nature,
Oui, toute ton allure, beauté,
Me suffoque et me dit d’aller,
Me dit de chanter, et me plaît.
1931
Aimer certains, c’est un fardeau ;
Toi, tu séduis sans insistance —
Percer tes charmes équivaut
À voir la clé de l’existence.
De vérités en variétés.
Avril s’avise, rêve, vibre...
Ces bases sont ta parenté ;
Ton sens, l’air pur, demeure libre.
Tous, on peut voir et tout savoir,
Vider de soi les mots-ordures,
Vivre sans être un dépotoir... —
La chose, au fond, n’est pas très dure.
1931
Aimer certains, c'est un fardeau;
Toi, tu séduis sans insistance -