L'infidélité fait mal. Mais quand on lui accorde un statut particulier dans la hiérarchie des écarts de conduite conjugaux, on risque de la laisser éclipser les comportements inqualifiables qui l'ont peut-être précédée, ou qui en sont même à l'origine.
... j'ai fini par remettre en cause l'hypothèse selon laquelle l'infidélité est la mère de toutes les trahisons.
La sexualité est le langage consacré qui permet aux hommes d'accéder à un éventail d'émotions interdites. La tendresse, la douceur, la vulnérabilité et le soutien affectif n'ayant jamais vraiment été encouragés chez eux, le corps est devenu le lieu où ils ont cherché à se les procurer en les masquant derrière un langage sexualisé. Il ne faudrait peut-être pas prendre stricto sensu l'affirmation qui veut qu'ils ne s'intéressent qu'au sexe. Ce dernier est la porte d'entrée de leur antichambre émotionnelle.
C'est là qu'hommes et femmes divergent. Les premiers ont beaucoup plus tendance à apaiser leurs conflits intérieurs en se tournant vers des rapports sexuels moins compliqués, y compris les plaisirs solitaires ou tarifés.
Je dis souvent à mes patients que s'ils pouvaient insuffler à leurs relations ne serait-ce qu'un dixième de l'audace, de la gaieté et de l'entrain qu'ils déploient dans leurs liaisons, leur vie conjugale leur paraîtrait transformée.
En théorie du moins, l'infidélité réconcilie la sécurité et l'aventure nen nous promettant les deux - ce qui résout le problème. En sous-traitant son besoin de passion et de risque à un amant ou une maîtresse, la personne infidèle peut transcender l'ennui de sa vie domestique sans renoncer entièrement à celle-ci.
L'adultère est souvent la revanche des possibilités abandonnées.
Pour ce que j'en vois, la plupart des liaisons prennent fin même quand le mariage est rompu. Les amants ont beau s'aimer véritablement, leur idylle n'a jamais d'autre finalité que d'être une belle histoire.
[...] les spécialistes de la thérapie de couple souscrivent dans leur écrasante majorité à la théorie du symptôme. Ils peuvent ainsi se cantonner au terrain familier de la relation au lieu de s'enfoncer dans le bourbier de la transgression.
Octavio Paz décrit l'érotisme comme une soif d'altérité, et il est très fréquent que l'autre le plus enivrant découvert à la faveur d'une infidélité ne soit pas un nouveau ou une nouvelle partenaire, mais un nouveau moi.