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Critique de OuvrezLesGuillemets


Après ma récente lecture du magnifique ouvrage de François de Riberolles et Ugo Bienvenu « L'Incroyable périple de Magellan », j'ai voulu découvrir le récit qu'en avait fait Antonio Pigafetta.

Lorsqu'il embarque avec 236 hommes sur les cinq navires que constituent l'armada de Magellan, Antonio Pigafetta est loin d'imaginer les nombreuses épreuves qu'il va devoir affronter : Les tempêtes et risques de naufrages, les mutineries, les maladies dont le terrible scorbut, l'éprouvante traversée du Pacifique, une chute en mer, la bataille sur l'île de Mactan contre des tribus indigènes (durant laquelle Magellan trouvera la mort), le massacre du banquet de Cebu, la faim et la soif, le long retour sans escale par l'Atlantique pour éviter les navires portugais.
Tout cela pour au bout de plus de trois ans de voyage revenir à Séville avec 17 autres marins sur le Victoria, seul navire rescapé, et réaliser la première circumnavigation de l'Histoire (certain marins rejoindront plus tard Séville, ils seront donc au total 35 à avoir réalisés le tour du monde).

« le voyage de Magellan » d'Antonio Pigafetta est donc un précieux document relatant les évènements qui se sont produits durant cet incroyable périple. Rien que le fait qu'il nous soit parvenu est déjà en soit exceptionnel, mais il éclaire en plus sur le contexte dans lequel a été entrepris et réalisé ce voyage. Un témoignage rare que les éditions Chandeigne nous proposent dans la très belle collection « Magellane Poche » complété de nombreuses cartes et notes.

« Au commencement étaient les épices »

Le fameux incipit de la biographie de Magellan par Stefan Zweig nous rappelle que l'objectif initial du voyage, n'a jamais été – c'était même clairement exclu – de faire le tour du monde. le projet de Magellan, validé par Charles Quint, était de contourner l'Amérique, rejoindre les Moluques (seul endroit au monde où il était possible de récolter les clous de girofle) et prouver qu'elles se trouvaient du côté espagnol de l'antiméridien de Tordesillas. L'armada devait ensuite revenir par le chemin inverse à Séville afin de rester dans les eaux espagnoles.

De ce point de vue l'expédition sera un échec : les Moluques sont de l'autre côté de l'antiméridien et appartiennent donc à la couronne portugaise.

Ce sont les circonstances exceptionnelles et dramatiques du voyage qui permettront en revanche la première circumnavigation de l'Histoire.

Je m'attendais à lire un journal de bord « classique » et donc avoir des informations au jour le jour, ce n'est pas le cas. La « Relation d'Antonio Pigafetta du premier tour du monde » est en fait divisée en petits chapitres successifs revenant sur les principaux évènements du voyage. Un récit qui n'est pas exempt de certaines omissions ou erreurs, mais que les notes très détaillées et documentées de l'édition Chandeigne permettent de compléter ou corriger.

Antonio Pigafetta ne se contente pas de décrire les faits marquants, il prend le temps aussi d'observer et de rendre compte de la vie à bord et plus encore des nouvelles terres. Description des indigènes, soucis de noter quelques vocables de ces peuples, description aussi de la faune et de la flore, le regard ethnographique et naturaliste de Pigafetta, même s'il est un peu candide, apportent de précieuses informations. C'est parfois répétitif (les tribulations en Indonésie après la mort de Magellan), approximatif ou un peu étonnant mais on sent l'envie simple de découvrir et de s'émerveiller. Grâce à lui nous avons ainsi la première description des géants patagons qui l'ont visiblement beaucoup marqué.

Ce qui transparait aussi au fil du récit, c'est l'admiration que Pigafetta porte à Magellan, en témoignent ces quelques lignes relatant la mort du capitaine-général :
« et tout soudain ils se ruèrent sur lui avec des lances de fer et de cannes, et avec ces javelots, si bien qu'ils occirent notre miroir, notre lumière, notre réconfort et notre vrai guide. »

J'ai trouvé amusante la stupéfaction de Pigafetta devant le phénomène que comprendra Phileas Fogg dans le roman de Jules Verne :
« Et nous demandâmes aux nôtres du bateau, qu'ils demandassent quel jour on était. Il leur fut répondu par les Portugais qu'il était jeudi, ce dont ils furent très ébahis parce que pour nous il était mercredi, et nous ne savions comment nous avions failli. Car tous les jours moi, qui fut toujours sain, j'avais écrit sans aucune omission chaque jour. »

Le livre est dans un format poche mais profite d'une réalisation plus que soignée. Les images et illustrations couleur sont de très belles qualités et permettent notamment une excellente lisibilité des nombreuses cartes qui complètent le récit. L'avant-propos très complet, les notes, la chronologie du voyage, l'index biographique de l'équipage, tout est fait pour rendre la lecture fluide, passionnante et enrichissante.
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