Citations sur Et moi, je me contentais de t'aimer (15)
Nel buio le parole erano innocenti, ma non inoffensive.
Dans le noir les paroles étaient innocentes mais pas inoffensives.
Ils firent l'amour comme on se jette à terre pour échapper aux bombes, comme on vole la nourriture dans des magasins dévastés, comme on recueille l'eau de pluie dans les flaques, comme on fait la queue pour du pain malgré les projectiles, comme on court entre deux immeubles pour ne pas se faire tirer dessus, comme on s'assoupit dans une cave bondée, comme on tète le lait maternel, sans le décider, sans savoir pourquoi - ils firent l'amour comme on reste en vie parce qu'on est nés, c'est tout.
page 352.
Si Dieu avait été attentif, ou en tout cas curieux, il les aurait regardés depuis sa contrée reculée : deux corps suspendus, muscles solides et cœur alerte ; il les aurait vus se mouvoir dans la pénombre, éclairés par une seule bougie, avec la même confiance que deux artistes de cirque, les bras déployés comme des ailes d'oiseaux ou comme ceux de son fils en croix ; il les aurait entendus crier de peur et d'excitation. Si Dieu avait été ici-bas plutôt qu'à l'abri bien au chaud, face à ces deux silhouettes chancelantes dont les cris résonnaient entre les voûtes immenses ; s'il avait vu l'éclat soudain des bombes les révéler d'un coup tels qu'ils étaient, deux enfants, il aurait été attendri comme n'importe quel petit vieux, et il aurait peut-être pris en main leur destin. Mais Dieu était en exil, il l'a toujours été - et Nada ne pensait même pas à lui.
page 43.
Ne fais pas le Croate bosnien, je ne mange pas de ce pain-là. Mais non, penses-tu. La religion catholique n'est pas plus honnête non plus, parce qu'elle te fait croire que l'univers a été créé pour toi. Alors qu'en fait non, tu es le pur fruit du hasard, comme les virus, les bactéries.
pages 315-316.
Quelle naïveté de croire que l'amour plus fort que la souffrance.
page 315.
- Les gens, n'importe qui, des gens comme toi et moi. Ils arrachaient les légumes des mains des paysans, on aurait dit des bêtes enragées par la faim. Ils volaient dans les potagers. Même la police, même les soldats, ils volaient les aides humanitaires et les revendaient sur la marché. Moi, j'avais des navets et des choux sur le balcon, et les pigeons venaient me les piller, j'aurais voulu avoir un fusil pour leur tirer dessus !
page 243.
Je veux dire, si la règle c'est de ne pas tuer, alors elle vaut tout le temps, si la vie humaine est importante, alors elle l'est tout le temps : comment est-ce que je peux tuer pour survivre, comment est-ce que je peux décréter que ma vie vaut plus que celle d'un autre.
( ...)
Si quelqu'un essaie de te tuer, il disait, tu te défends, c'est tout. Oui, mais moi je ne peux vivre avec ce poids. Je ne veux pas vivre au détriment de la vie de quelqu'un d'autre. surtout que tôt ou tard je vais mourir aussi, alors autant me rendre.
page 192.
le nobel pour une chose que vous ne savez pas quantifier, ni décrire, une chose abstraite, une affaire qui ne concerne que nous, "il suffit qu'il n'y ait plus la guerre", la malédiction d'êtres humains et mortels
d'avoir des enfants
d'être des enfants
page 180.
Ils représentaient un poids, pour tout le monde. Pour ceux qui les avaient conçus comme pour ceux qui les avaient accueillis quand ils étaient devenus des réfugiés.
page 175.
Un État fondé sur l'identité ethnique n'est pas un État démocratique.
page 163.