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Critique de fabienne2909


Etrange titre que ce quasi antinomique « Feu » pour décrire une relation amoureuse si froide… J'ai eu l'impression de lire cet ouvrage dans un brouillard glacé, à l'instar de celui dans lequel se débattent les deux personnages principaux, Laure et Clément. Elle, elle se sent comme endormie, spectatrice de sa vie, sans aucune volonté d'y jouer un rôle, et lui se sent déjà mort. D'ailleurs, il ne veut aucune attache, ne recherche rien, et la fuit, alors qu'elle, elle s'accroche à ce rien comme si c'était un grand tout : « Je pense toi, tu vas vouloir me sauver. Je ne serai pas des vacances mais une vocation, tu seras écrasée ou écrasante, je serai un connard ou la victime. Dans les deux cas je vais fuir, tu me chercheras, on est très mal barrés, pense Laure à ceci : si j'avais voulu qu'on me trouve, voulu quoi que ce soit, j'appartiendrais à quelqu'un d'autre qu'un bouvier. » Ca promet… ou plutôt, dès le départ on lit que ça ne va pas promettre grand-chose.

Ce pas grand-chose, c'est une relation amoureuse, adultère, Laure étant mariée, qui commence sur un coup de tête de cette dernière, un coup de feu pour ce Clément, grand cadre d'une banque qu'il surnomme la Banquise, qui a achevé de « le glacer jusqu'aux couilles », alors qu'elle l'a contacté pour participer à un colloque qu'elle organise. Elle lui rentre dedans, il se laisse faire, car il semble dépourvu de toute envie ou volonté dans une vie passée à se laisser flotter au gré des (non) événements, lui qui n'aime rien ni personne, hormis son chien qu'il appelle Papa (oui oui !). Elle, elle entretiendra seule ce feu qui brûle à l'intérieur, qui menace de la consumer, lui faisant abandonner pour de bon un mari pour qui elle ne ressentait pas grand-chose, et deux filles qu'elle laissera partir à la dérive, sans rien faire, parce qu'elle s'en fout, de tout. Au moins sur ce point Laure et Clément se trouvent-ils un point commun.

Ce roman est plutôt long, et pendant tout ce temps de lecture je me suis demandé ce que Maria Pourchet a souhaité nous raconter avec cette description d'un roman d'amour à l'envers, d'une histoire qui ne peut pas fonctionner, due principalement à ce Clément qui est, sinon mort, en tout cas dans une spirale dépressive dangereuse due, ou causée, par un certain goût pour la haine de lui et pour la raclure. Car c'est un connard fini, il le sait et il le veut.
L'histoire est narrée en court chapitres qui adoptent le point de vue de Laure ou de Clément, un « tu » qui malgré son côté englobant et son accès direct aux pensées de Laure m'a laissée complètement en dehors, et le « je » de Clément qui m'a incluse dans son délire autocentré de force, tellement il est malsain bien que triste (il m'a fait penser par certains côtés à Jason Bateman, mais sans les meurtres, pour cet affichage de fric totalement cynique). Ce sont ainsi deux personnages antipathiques auxquels il est difficile, et pour moi je dois dire que cela a été impossible, de s'attacher, tellement ils m'ont semblé désincarnés. Ils sont crédibles, il faut dire que c'est remarquablement écrit, pourtant on a du mal à ne pas les voir comme des purs personnages de papier tellement ils sont vides, sans émotions, déconnectés d'eux-mêmes. A tel point qu'on se demande ce que Laure, qui pourtant est celle qui ressent le plus de choses des deux, poursuit : une relation vraiment ? Ou ne serait-ce pas la sensation d'être vivante, que quelque chose se passe dans sa vie qu'elle ait choisi, et que ce soit Clément ou un autre… au moins a-t-il l'avantage d'être totalement indisponible.

Je me suis également demandé ce que Maria Pourchet souhaitait que l'on ressente à la lecture de ce roman. Pour ma part, j'ai été comme anesthésiée dans cette froidure, à chercher en vain la petite flamme d'émotions, de chaleur humaine. Il m'a donné l'impression que la vie est laide, que l'espoir ou l'amour sont des mots vides de sens. Autant dire que j'ai été heureuse de le terminer, pour aller me réchauffer dans d'autres lignes.
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