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Critique de Melopee


Ce récit est autobiographique et c'est celui de la journaliste Martine de Rabaudy qui confie son expérience auprès d'une mère atteinte de PMD (psychose maniaco-dépressive) de sa jeunesse à la mort de cette dernière. Cela s'ouvre sur la naissance de l'auteur, mal vécue puisqu'il s'agit d'une fille mais qui n'est qu'un marqueur en plus sur le long tracé fait de hauts et de bas de la maladie de sa mère.
J'ai aimé cet incipit :
"Au départ, pourtant, entre ma mère et moi le courant passait...
Des séries d'électrochocs, tout au long de sa grossesse, nous y avaient beaucoup aidées." (p. 11)

D'entrée de jeu, le lecteur se doute que la relation mère/fille sera compliquée, marquée par des symptômes à répétition et qui ne connaîtront pas de fin : phase de mélancolie, phase de panique, phase d'abattement, l'humeur est constamment exacerbée et pour les proches il faut faire face à l'imprévisible. Autour de la description de la maladie de sa mère, Martine de Rabaudy évoque justement l'entourage immédiat qui subit de plein fouet les rechutes et désillusions. Il y a le jeune frère qui prend de la distance jusqu'à partir très loin pour éviter cette mère qu'on ne peut canaliser. Il y a aussi le père qui isole sa compagne pour qu'elle vive dans un cocon, à l'abri du monde, afin de ne pas susciter les émotions tant redoutées. Est-ce pour autant la bonne réaction à adopter ?
Enfin, il y a le grand-père maternel, solide appui, qui marque la vie de la narratrice en y ancrant les livres et le goût de l'écriture.
C'est chez lui qu'elle trouve le repos, le répit et la bienveillance. Elle décrit son séjour chez ce grand-père comme une parenthèse agréable parmi les nombreux tourments qui ne l'ont pas épargnée, malgré le fait que la malade, ce n'était pas elle directement.

Le récit est chronologique et plein de références littéraires très justes sur des personnalités (Louis Althusser, la mère de Duras, la femme de Fitzgerald...), elles aussi touchées par ce mal étrange qu'est la PMD. Cela permet une prise de recul permettant de relativiser ce mal étrange qui touche bien plus de personnes qu'on ne le croit. Mais, quelque part, il est indétectable car il ne se manifeste pas par des réactions physiques (les mouvements d'humeur, certes mais tout ce qui s'agite est en fait intérieur). Quelle situation déstabilisante cela doit être pour les proches qui sont les victimes collatérales de cette maladie sournoise. Ainsi sont évoquées des épisodes douloureux, des phrases assassines, un désintérêt de tout. L'auteur bien que lucide nous fait le portrait de sa famille avec une touchante sensibilité qui ne nous rend pas sa mère misérable ni pitoyable. Elle nous rend en lutte constante avec elle-même (un mot trouvé dans le porte-feuille du père aura tôt fait d'éclairer sur l'ambivalence constante) et forte. Sauf que, les années s'écoulant, la PMD n'est plus le seul mal contre qui se battre.

Sans être directement liée à cette maladie, le récit ne peut que toucher car il est extrêmement bien raconté. Je l'ai lu comme une fiction à multiples rebondissements avec portrait d'une famille dans la tourmente et le point de vue éclairé d'une narratrice très en phase avec les émotions, précautionneuse tout autant "désespérée" sur la marche à suivre pour obtenir une possible rémission. Plus les séances d'électrochocs s'enchainent, plus il devient difficile d'imaginer une quelconque voie de sortie.
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