Ce trou en excès dont on ne sait le centre
Ce trou en excès dont on ne sait le
centre qui est en moi comme une
ville monstrueuse où toute limite est
en recul où tout est perte et infranchi
et les mots ne s’ouvrent plus et la
mémoire est une lune morte.
cette énorme réserve
impatiemment engloutie.
la masse du temps
le vide interne.
ah que j’échappe enfin
à l’inconséquence des choses.
Il imagine
Il imagine
un récit mobile comme une flèche
des étoiles nouvelles
et sous les pierres qu’il déplace
la vie imperceptible.
il regarde obliquement
son passé irréparable
les trahisons l’usure
les images radieuses les autres.
il voyage
à l’écart de soi traversé par la soif.
il dormira
contre la terre comme il fit
enfant
parmi les papillons et les jonquilles
dans le savoir obscur des signes
Nous la rivière
Nous la rivière
l’antique jeunesse
dérivant.
nous les nuages
et nous les mots perdus
l’élan l’effroi.
nous l’automne et l’épine
la lumière recluse
l’invisible vie.
et le soleil atténué
la phrase des corbeaux.
nous les nombres et la
distance le temps désenchanté
l’herbe amère.
nous enfin dans l’effacement des lignes et
le sable sourd
le large oubli.
Vous, absence, vous, ombre
Vous, absence, vous, ombre.
invisible rose.
bouche à jamais secrète.
qui dirait que le temps
vous ensemence
et que ce feu obscur
suscite
plus loin que toute mémoire
vos royaumes, vos courses, vos ciels.
Dans les yeux la page et l’alouette
Dans les yeux la page
et l’alouette
hélice sans poids
le ciel simple.
j’improvise
dans le proche et le lointain
l’espace possible la vie béante
la lumière et l’accident.
dire que tout ceci
s’écrase dans le froid
se dissout
les mots perdent mesure
où nous ne sommes pas.
puis le sommeil reprend force
la grande phrase anonyme
la nuit neutre.
Cerné d’hivers
Cerné d’hivers
le monde penche
le monde faible
avec ses automobiles merveilleuses
les crimes les gloires les écorchements
la poudre de tant de vagues sur les pages des livres
et nos étroits labours
et nos soleils secrets.
je suis comme un insecte tâtonnant et
qui cherche le jour.
les couleurs et leurs maisons
les fées réelles.
venue de quel recoin obscur la
beauté qui ne souhaite rien
comme une veuve.
Terre au-devant de nous.
l’accent mobile des toits.
les villages de plein vent. l’écart des routes.
où sommes-nous ?
l’air étal sans retombée
vague après vague les heures les années
le manque et la douleur
lieu imaginaire lieu vrai
il fait un vent de rossignol et de forêt
vers la ville.