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Critique de colimasson


Au début, j'ai cru que j'étais devant un épisode de Daredevil. Ça m'a soulée. Déjà un de mes collègues m'avait dit : je regarde pas beaucoup de séries mais si je devais t'en conseiller une, ce serait Daredevil. Et Luke Cage, qu'il a ajouté. Luke Cage, j'avais vu l'image sur Netflix, c'est un black balèze avec plein de muscles qui a l'air d'avoir la haine contre un truc, on sait pas ce que c'est. Je m'étais dit que c'était le genre de truc que je regarderais peut-être un jour, par exemple si j'ai un grave accident et que je ne peux pas sortir de mon lit - et que j'ai déjà regardé tout ce qu'il y a de plus intéressant cinquante fois avant. Après, mon Duduche m'a dit que Daredevil, c'était une de ses séries préférées aussi et qu'il fallait que je voie ça. Alors un jour, on a regardé pendant le dîner, pour lui faire plaisir. Je me souviens, j'avais fait cuire un artichaut, le premier de l'année, pour moi toute seule. C'est jamais bon de se souvenir de ce genre de détail quand tu es censée être devant la série du siècle. Cet artichaut m'a d'ailleurs bien occupée pendant le premier épisode. Je dirais pendant au moins dix minutes. Ensuite il ne restait plus que quarante minutes, c'est supportable. Ensuite, on n'a plus jamais regardé, ouf.


Je vous raconte vite fait l'histoire de Daredevil. le super-héros, il est aveugle. En plus de ça, il est beau gosse. En gros, tellement cliché qu'on oublie sa gueule en cinq minutes. En plus de ça, il a du charisme. Il fait mouiller les filles rien qu'en parlant de sa voix grave. Il traîne toujours avec lui un mec qui est censé être son pote et qui est assez moche, un peu con, le genre gros lourd. du coup le contraste entre les deux est assez saisissant. C'est censé nous impressionner que le mec aveugle soit un super-héros. C'est qu'il a développé plein de compétences hypersensorielles. A un moment, il sauve une fille. La fille, belle blonde aux cheveux longs et à la taille élancée, succombe aussitôt à son charme même s'ils se disent rien. A un moment, elle vient même pioncer chez lui parce qu'elle ne peut plus rester chez elle, à cause de méchants qui la menacent. le super-héros, aussi super-classe, la laisse dormir dans son lit pendant qu'il se fait une petite branlette sur le canapé pour évacuer la pression. Mais la meuf, comme elle est un peu conne, elle retourne quand même chez elle en pleine nuit sans rien dire à personne et bien sûr, les méchants sont là et ils n'attendent que ça, de pouvoir la buter. Heureusement, entre temps, l'aveugle a revêtu sa tenue de super-héros et il vient sauver la cruche au moment où les méchants allaient lui asséner le coup fatal. Et la meuf super-conne tombe instantanément amoureuse du super-héros mystérieux, sans savoir que c'est en même temps l'aveugle trop mignon qui l'héberge et dont elle commence aussi à tomber un peu amoureuse, mais pas trop quand même car elle ne sait pas encore que c'est le super-héros.


Bref, quand j'ai commencé à lire Fucking Business, j'ai eu l'impression de retrouver ce genre d'intrigue qui vous donne des envies d'allouer tout le budget de l'état à la guerre plutôt qu'à ce qu'on appelle aujourd'hui la culture. Un mec qui vient là prendre sous son aile une pauvre demoiselle égarée dans la vie et qui veut faire d'elle sa disciple dans la profession de tueur corporate : ça vous rappelle pas quelque chose des fois que ? Et ensuite bien sûr, on le sait tous, ça ne va pas se passer aussi bien que prévu et on met des histoires de meurtres, de fric et d'autres conneries pour meubler l'histoire. le bien et le mal s'affrontent : où est le mal ? où est le bien ? et si le bien était un mal qui ne dit pas son nom ? Des questions éculées dans ton cul. On pourrait essayer de chercher le sens profond de ce que vivent les personnages de Fucking Business mais ils ne sont que la vitrine de notre époque. Ce qui est peut-être d'ailleurs le but recherché puisque Do Raze, l'auteure de ce roman, cite en exergue de son livre Joseph Schumpeter :


“Ce processus de « destruction créatrice » constitue la donnée fondamentale du capitalisme : c'est en elle que consiste, en dernière analyse, le capitalisme et toute entreprise capitaliste doit, bon gré mal gré, s'y adapter. »


C'est une histoire sans rédemption, blafarde sans être sombre, désespérée sans être exaltée, critique sans être cynique. C'est l'histoire terne de personnages qui vivent dans un monde où les émotions sont reléguées à l'arrière-plan de la technicité, dans un monde où la soumission est de règle. C'est une histoire que j'ai lu avec un professionnalisme froid et agacé en attendant de passer à une nourriture plus substantielle.
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