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Critique de horline


Grâce au romancier Rick Bass, j'ai découvert qu'il existait une poésie de la matière, le désert de l'Ouest du Texas dans Toute la terre qui nous possède n'était plus une surface plane et inerte mais un formidable fouillis souterrain sculpté par les strates du temps et se lisant comme un livre d'histoire de la Terre.
Je retrouve cette même idée directrice et la même fascination dans Quand les montagnes dansent, ouvrage inclassable dans lequel le philosophe Olivier Rémaud, contemplateur avisé de la nature, déroule toutes ses ressources pour redéployer les architectures du monde. Trop segmentées, trop hiérarchisées, trop anthropocentrées.

C'est en promeneur absorbé par les montagnes du Queyras que l'auteur nous projette dans une dynamique géologique qui dépasse notre imagination. le récit intime est adossé à des références scientifiques abondantes et pertinentes pour s'inscrire en faux avec les entreprises scientifiques et épistémologiques qui ordonnent, séparent, érigent des frontières entre le monde vivant et le monde minéral. Il rend obsolètes toutes les classifications en rappelant non seulement les dynamiques qui existent entre les vivants et les éléments constitutifs de la planète, « les alliances expressives » qui ont généré la vie organique et traversé tous les âges de la Terre. Mais également la dynamique propre qui anime le manteau terrestre depuis les sédiments des commencements et qui exclut toute conception inanimée de la matière.
L'auteur met en cause la démarche taxinomique qui ne répondrait en fait qu'aux impératifs du langage humain. Comme chacun sait, le langage ne permet pas d'appréhender la réalité dans toutes ses dimensions, il en affaiblit l'épaisseur temporelle.
C'est donc à travers un texte difficile à qualifier, mâtiné de philosophie où l'homme n'est plus transcendantal, une sorte d'épopée inspirée de la montagne dans laquelle l'auteur rend sensible l'interdépendance qui lie tous les éléments quelque soit leur nature, leur composition, leur force d'inertie. J'ai été particulièrement envoûtée par cette montagne que l'auteur parvient à transformer en spectacle corrodé de sel marin.
Loin des approches écologiques esthétiques, des platitudes euphorisantes, c'est le genre de livre qui oeuvre pour décloisonner les disciplines et nous invite « à rendre plus effectives nos écologies affectives ».
Ouvrage suffisamment documenté pour être enrichissant et suffisamment limpide pour être captivant. Je remercie les Éditions Acte Sud pour la découverte de cette nouvelle collection « Mondes sauvages ».
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