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Critique de GeorgesSmiley


Alice Clifford est un personnage de fiction. Quel beau prénom, vous ne trouvez pas ? Il me fait irrésistiblement penser à la petite Alice Liddell pour laquelle Lewis Carroll inventa le Pays des Merveilles. Analogie surprenante voire saugrenue me dira-t-on. En y regardant de plus près, l'Alice de Carroll n'était-elle pas une exploratrice aventureuse (peu soucieuse de savoir comment sortir du terrier du lapin), attentive et curieuse (comme un bon reporter) du monde merveilleux (au sens de surprenant, étonnant) qu'elle visitait? Ce monde-là hébergeait, lui-aussi, des personnages cruels (la reine de coeur dont la phrase favorite est « qu'on lui coupe la tête ! ») et fous. Notre héroïne, correspondante de guerre pour un quotidien américain, adore, elle aussi, l'aventure, traquant une information aussi déconcertante que désolante dans un monde dont personne ne peut prétendre que les dirigeants soient moins cruels et fous que ceux de l'univers créé par Lewis Carroll ?
Alice Clifford couvre la décennie terrible (36-45) depuis Rome, sans oublier de se rendre en Espagne, en Allemagne au moment de la Nuit de Cristal et en Egypte au moment où les Anglais mettent le roi Farouk devant ses responsabilités. Armée de sa machine à écrire, sans que sa « cuillère soit assez longue pour souper avec tous ces diables », elle assiste aux festins des monstres, à leurs mainmises sur l'Europe, à leurs exactions et à leurs chutes. Elle croise le futur Pie XII, interviewe Mussolini et côtoie les célèbres Martha Geldoff et Virginia Cowles, dont son personnage s'inspire.
L'idée de bâtir un roman historique à partir d'un diplomate de l'entourage immédiat du comte Ciano, gendre de Mussolini et ministre des Affaires Etrangères, est excellente, d'autant que, de ce côté-ci des Alpes, la guerre du côté italien a été, me semble-t-il, peu traitée.
J'ai particulièrement apprécié le traitement réservé (je n'en dis volontairement pas plus) par l'auteur à Hemingway, aux dignitaires nazis, aux déchirements de la noblesse romaine, au sort des juifs italiens, à l'attitude du pape Pie XII, ainsi qu'à celle du roi Farouk et du grand mufti de Jérusalem. C'est fait en quelques mots, une ou deux lignes mais c'est dit et ça a le mérite d'être conforme à la réalité historique.
Un léger bémol : dans cette époque tragique, Alice n'évolue qu'au milieu de gens charmants, intelligents et altruistes (ah ses trois amants ! l'Italien qui, bien que fasciste, n'est ni volubile ni stupide, l'Allemand qui, bien que nazi, n'est ni sanguinaire ni haineux et l'Egyptien qui, bien que mari abandonné, n'est ni machiste ni rancunier). Pourquoi pas ? Des hommes comme ça, il a dû y en avoir, il y en a peut-être encore…Trois pour une seule femme, c'est beaucoup. Sans doute comme beaucoup de ses lectrices, Theresa rêvait et…Theresa l'a fait. Alors ne boudons pas notre plaisir à la lecture de ce roman historique de qualité, découvert avec le jury du prix des lecteurs du Livre de Poche, et qui donne envie de découvrir les autres oeuvres de Theresa Révay.
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