Karl trouvait V de plus en plus charismatique. Il comprenait pourquoi il dirigeait cette communauté. Les gens lui faisaient confiance et cela était totalement réciproque. Le vieillard en vint rapidement à l’épisode de l’assaut aérien qui s’enchaîna également avec celui de la poursuite dans la forêt, puis à la mort d’un Félon. Au fur et à mesure du discours, Karl revoyait la scène. Cela le rendait malade, c’était plus fort que lui. Cette petite ville qui tentait de survivre au chaos allait entrer dans une guerre qu’elle ne pourrait peut-être pas gagner, c’était la triste vérité. Il parcourut la foule du regard et vit avec effroi des enfants et des adolescents, eux aussi, hypnotisés par les sages paroles qu’ils étaient en train d’écouter...
Eux aussi sont des traîtres, Morgan, et les traîtres ne méritent pas de vivre.
– Tout nous a été pris, effectivement. Mais je pense que c'est justement les rêves que nous poursuivons
qui nous font sentir vivants. Sinon, à quoi servirait cette vie ?
Jamais une nuit n'avait été aussi difficile. À plusieurs reprises, il pensait que tout allait prendre fin, qu'ils ne repartiraient pas vivants de ce trou.
Il voulait s'effacer quelque temps, laisser la ville méditer sur ce qui lui arrivait. Quand je serai dans le sud, ils auront autre chose à penser. Alors, je pourrais leur prouver que je n'ai rien à voir avec tout ça et qu'ils peuvent me faire confiance.
– Nous sommes sur leur territoire. Et pour avoir survolé cette zone, nous allons être punis. Ils sont venus pour nous tuer.
Il accentuait la position de son regard sur un point fixe choisi au hasard parmi l’immensité du ciel, mais il se rendit à l’évidence même qu’il n’y changerait rien. Il restait un homme, rien de plus.