Citations sur Leona, tome 1 : Les dés sont jetés (47)
Jouer celle qui ne comprenait pas, c’était mon unique option. L’effort nécessaire pour empêcher ma voix de trembler était monumental. Les battements de mon cœur avaient repris et suivaient désormais un rythme effréné.
C’est difficile à concevoir, je vous le concède. Mais il faut parfois savoir accepter que n’importe qui peut être un criminel, même ceux qu’on soupçonne le moins.
Cela dit, je n’aimais pas sa manière de me scruter. Ce genre de regard inquisiteur qu’ont les psychologues et autres thérapeutes. Comme s’ils essayaient de deviner toute la psyché d’une personne rien qu’en l’examinant. Je suis allée aux toilettes, me suis posée sur le couvercle du siège et me suis pris la tête entre les mains. Bien que je sois assise et immobile, je sentais le monde tourner autour de moi.
Un meurtre.Ce mot, que j’avais tant de fois lu, écrit et prononcé dans mon travail, était désormais porteur d’un sens nouveau. Quelque part au fond de mon crâne, une voix me hurlait de ne pas faire ça. La partie résolue de ma conscience étouffait sans peine ces gémissements, car je savais qu’il n’y avait pas d’autre solution.
Quand on prend ce travail au sérieux, on reste discret. On ne va pas faire le guignol dans ce genre de reality show financé par la publicité. Hélas, cette émission a fortement influencé l’image que le grand public se fait des médiums et décrédibilisé l’apport que nous pouvons offrir à une enquête criminelle.
Il n’y a pas d’honneur pour les personnes comme moi. Je voulais que les gens sachent quel genre de porcs dirige le pays, c’est tout. J’aurais tort d’espérer autre chose. Jusqu’ici, j’ai été dépeinte comme une menteuse par les médias. Une pute obsédée par la célébrité qui ne cherche qu’à causer des emmerdes. Aujourd’hui, je fais tout ce que je peux pour rester discrète. Je n’ai plus qu’à faire profil bas et attendre.
Ce qui différencie mon travail du vôtre, c’est que nous ne lançons pas des accusations au hasard en essayant à tout prix de faire le lien entre des événements isolés. Nous rassemblons des preuves, sur lesquelles nous nous appuyons ensuite pour établir un raisonnement. Pour accuser quelqu’un d’un forfait, il faut pouvoir démontrer un lien entre cette personne et un crime bien spécifique. On ne se fonde pas sur de vagues suppositions, mais sur des preuves tangibles qui ne laissent aucune place au doute. Ce que vous avez là est très loin de constituer une base suffisante pour inculper quelqu’un.
L’incrimination d’un policier était une chose fâcheuse en soi. Prétendre qu’un agent des forces de l’ordre était coupable de crimes de cette trempe, où un enfant était impliqué, et que ce même agent enquêtait sur l’affaire, constituait une accusation grave dont il serait difficile, pour ne pas dire impossible, de persuader quiconque. Cerise sur le gâteau, il s’agissait d’une femme. À bien y réfléchir, tout cela semblait tellement improbable qu’il commençait lui-même à hésiter.
Tous les autres moyens pour obtenir de l’argent avaient échoué. Les braquages étaient mes seuls succès, et il fallait désormais en perpétrer un troisième. La menace ne suffirait pas pour faire taire Nina. Il était nécessaire de lui promettre une grosse somme. Ainsi, elle se verrait elle-même en complice, et non plus en simple victime. Et un complice ne porte pas plainte.
Voyage, trouve-toi un homme à l’étranger, pars vivre dans un autre pays quelques années. Quand tu reviens, commence un nouveau boulot dans un domaine qui te plaît. Rien de tout cela n’est hors de portée. Il suffit de faire le premier pas.