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Critique de GeorgesSmiley


Un bon roman bien épais, avec tout ce qu'il faut de romances, d'aventures et de suspens, construit sur un socle très solide de connaissances et de documentations. La mise en place est longue et pourrait sembler ennuyeuse ? Ce n'est pas mon avis. le décor et les problématiques de cette fin d'année 1940 en Espagne, en Grande-Bretagne et dans toute l'Europe à feu et à sang méritent bien ces chapitres tout comme la cohérence et l'épaisseur des personnages, anciens des public schools anglaises, brigadistes de 1936, infirmière de la Croix Rouge, affairiste sans foi ni loi, militaires phalangistes ou monarchistes, madrilènes rescapés de la guerre civile ou orphelins maltraités. Cette partie se lit très agréablement parce que les personnages principaux ont du caractère, un passé et une histoire ayant forgé des convictions. Les personnages secondaires, quant à eux, illustrent bien les problématiques anglo-britanniques de cette année 1940 : L'hésitation de Franco à entrer dans la guerre, la pression allemande pour l'y entraîner et les efforts anglais pour l'en dissuader. Et aussi les rivalités entre phalangistes et monarchistes, la misère noire du petit peuple madrilène, la rancoeur des vaincus de la guerre civile envers les vainqueurs et réciproquement. Ou les dissensions toujours vivaces entre socialistes et communistes, masquant derrière les grands idéaux et la solidarité affichée entre « camarades », les petites bassesses et antipathies communes à l'ensemble du genre humain.
Le rôle de l'Eglise, persécutée par les Républicains puis soutien du nouveau régime, est lui-aussi finement illustré au-travers de ses hésitations face au sort des vaincus. Ce dialogue, dans un camp de prisonniers républicains, en est un exemple :
« Il ne s'agit pas d'une joute intellectuelle. Nous sommes dans un endroit où l'on empêche les malades de recevoir des soins et où l'on fait travailler des hommes jusqu'à ce qu'ils en meurent, sur ordre du gouvernement que votre Eglise soutient.
_ Vous n'êtes pas espagnol, Piper, répondit le prêtre en soupirant. Comment pouvez-vous comprendre ce qu'a été la guerre civile ? J'ai eu des amis, des prêtres, qui ont été faits prisonniers en zone républicaine. Ils ont été fusillés, jetés du haut des falaises, torturés…
_ Et c'est la raison pour laquelle vous vous vengez sur nous. Je croyais que les chrétiens étaient censés se conduire mieux que les autres hommes, dit Bernie avec un rire amer. »
Tout ceci est fort bien décrit, se lit agréablement et nourrit une intrigue complexe qui se développe jusqu'à un dernier rebondissement assez inattendu qui permet à ce très bon roman d'habilement mêler aventure passionnante et vraisemblance historique.
Et puis, « last but not least »…
« Dans le lointain, là où la Tierra Muerta s'estompait sur l'horizon brumeux, Bernie aperçut soudain une chose extraordinaire. Au-dessus d'une couche de brouillard blanc se dressait une falaise sur le bord de laquelle étaient perchées des maisons dont les fenêtres miroitaient sous le soleil. Elles paraissaient incroyablement proches et avaient l'air de flotter sur la brume. « Regarde, amigo, ce spectacle ne vaut-il pas la peine de rester en vie ? Ce n'est pas si souvent qu'on a la chance de voir ça. »
Ca, c'est Cuenca (à mi-chemin entre Madrid et Valence), dont le site est classé au Patrimoine mondial de l'Humanité. Ca donne envie d'y aller voir et de lire les autres romans de C.J Sansom.
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