J'ai toujours pensé qu'il s'agissait d'un état d'âme sublime et merveilleux ; digne même, s'il est déçu. [...] Mais le sentiment amoureux n'est que végétatif, Geralt, horriblement et banalement végétatif. C'est l'état de quelqu'un qui succombe à la maladie, qui ingurgite un poison. Car, semblablement à celui qui s'empoisonne, l'amoureux est prêt à tout pour obtenir l'antidote. A tout.
Va en paix, mais vas-y vite
Il est facile de tuer avec un arc, jeune fille. Il est facile de lâcher la corde en pensant : ce n'est pas moi, c'est la flèche. Mes mains ne portent pas le sang de ce garçon, c'est la flèche qui l'a tué, pas moi.
Mais la flèche ne rêve pas la nuit. Je te souhaite de ne pas rêver non plus, petite dryade aux yeux bleus.
Du balai, enculeurs de bottes.
- Pourquoi une telle ironie ? J’essaie de t’expliquer les raisons pour lesquelles les magiciens éprouvent de l’antipathie à l’égard des charlatans de village, des enchanteurs, des guérisseurs, des mauvaises fées et des sorceleurs. Nomme ça comme tu l’entendras, de la jalousie si tu veux, mais c’est bien là l’origine de l’animosité. Nous sommes exaspérés lorsque la magie, cet art qu’on nous a présenté comme élitiste, le privilège des meilleurs et le plus sacré des mystères, tombe entre les mains des profanes et des autodidactes. Même lorsque cette magie ne vaut pas un clou. C’est la raison pour laquelle mes confrères ne t’adorent pas. Moi non plus, soit dit en passant, je ne t’aime guère.
Tu sais, Yennefer, je préférerais ne pas vivre jusqu’au moment où se réalisera ton idée de domination de l’homme et jusqu’au moment où tes semblables occuperont la place qui leur incombe dans la nature. Pas bonheur, cela n’arrivera jamais. Vous vous dévorerez entre vous, vous vous empoisonnerez, vous succomberez à la fièvre et au typhus, car ce seront plutôt la saleté et les poux, pas les dragons, qui menaceront vos villes si magnifiques où les femmes enfantent tous les ans, mais où un nouveau-né sur dix réussira à vivre plus de dix jours.
L'humanité est un enfant sans autonomie véritable.
- Tu es plus que ça, Ciri. Plus que ça.
Une étoile filante brilla dans le ciel : un éclair d'une seconde animant le noir firmament orné de points lumineux immobiles. Le sorceleur ne formula aucun vœu.
- Défendre les gens, leur sauver la vie, selon vous, c'est une chose bonne ou mauvaise ? Ces quatorze, sur la colline ? Vous, sur le pont ? Ce que vous-même avez réalisé, est-ce bien ou mal ?
- Je ne sais pas, réussit à répondre Geralt. Je ne sais pas, Yurga. Parfois, il me semble que je sais. Mais j'ai parfois des doutes aussi. Aimerais-tu que ton fils ait de tels doutes ?
- Et pourquoi pas ? répliqua sérieusement le marchand. Pourquoi ne pourrait-il pas douter ? Ce n'est là que chose humaine et bonne.
- Quoi ?
- Le doute. Seul le mal, seigneur Geralt, en est dépourvu. Et personne n'échappe à son destin.
VIII. Quelque chose en plus