Citations sur Le Sorceleur, tome 6 : La Tour de l'hirondelle (52)
Ils se ressemblent tous. Une congrégation, une confrérie dans laquelle tous, au bout du cinquième meurtre, deviennent identiques. Les mêmes gestes, les mêmes mouvements, la même façon de parler, de bouger et de se vêtir.
Les mêmes yeux. des yeux de serpent, impassibles et froids, immobiles et plats, dont rien, pas même la pire des horreurs, n'est plus capable de modifier l'expression.
- Silence, silence, les enfants…
- Maman, est-ce que ce sont les démons ? Est-ce la Traque sauvage ? Des spectres nés de l’enfer ? Maman, maman !
- Silence, silence, les enfants. Ce ne sont ni des démons ni des diables…
Pis que cela.
C’étaient des hommes.
Récemment encore, Geralt aurait raillé sans pitié celui qui aurait osé affirmer que lui, un sorceleur, prouverait une immense joie à la vue d'un vampire ; il l'aurait pris pour un idiot absolu.
Milva, me semble-t-il, traversa une période difficile à la suite de son tragique accident et de la perte de son enfant. Je dis bien, me semble-t-il, car je suis conscient qu’étant un homme je ne peux aucunement me représenter ce qu’une telle expérience peut signifier pour une femme. J’ai beau être un poète et un homme de plume, mon imagination me fait ici défaut et je n’y puis rien.
Prophétiser n'est pas un art. L'art consiste à prophétiser correctement.
Il aurait remarqué que la jeune fille parlait lentement, comme si elle avait du mal à trouver ses mots, qu'elle frottait nerveusement sa joue enlaidie par une affreuse cicatrice, qu'elle entrecoupait le récit de sa destinée de longs moments de silence. Il l'aurait entendue parler des sciences qu'on lui avait inculquées et qui s'étaient révélées mensongères et illusoires. Des promesses qu'on lui avait faites et qui n'avaient pas été tenues. De cette destinée en laquelle on l'avait enjointe de croire et qui l'avait lâchement trahie et privée d'héritage. Il l'aurait entendue raconter comment, chaque fois qu'elle commençait à croire, les brimades, la douleur, les vexations et l'humiliation s'acharnaient sur elle. Comment ceux en qui elle avait confiance et qu'elle aimait l'avaient trahie, n'étaient pas venus à son secours lorsqu'elle souffrait, et que l'opprobre, le supplice et la mort la menaçaient. Comment les idéaux auxquels on lui avait conseillé d'être fidèle l'avaient déçue, trahie, abandonnée au moment où elle en avait besoin, révélant ainsi combien ils étaient infondés. Comment elle avait trouvé aide, amitié et amour là où, en apparence, il convenait de ne rien espérer. Surtout pas de l'amour.
- Le monde de tes rêves est idéal pour les sorceleurs. Jamais ils n'y manqueraient de travail. Plutôt que des codes, des paragraphes et des clichés ampoulés sur la justice, ta conception encourage le désordre, l'anarchie, l'arbitraire, les intérêts privés, l'excès de zèle chez ceux qui veulent s'attirer les bonnes grâces de leurs supérieurs carriéristes, la vengeance aveugle des fanatiques, la cruauté des mercenaires, le sadisme. Ton monde, c'est un monde de terreur, où les hommes et les femmes ont peur de sortir après le coucher du soleil par crainte non des bandits mais des gardiens de la loi, car ces grandes chasses aux criminels ont pour résultat d'encourager les bandits à entrer en masse dans les rangs des défenseurs de l'ordre. Ta vision, c'est un monde de corruption, de chantage et de provocations, un monde de témoins de la couronne et de faux témoins. Un monde où règne la calomnie, la délation et la peur d'être injustement dénoncé. Un monde où, inévitablement, des innocents finiront sur l'échafaud, seront écartelés ou empalés. Un monde de criminels.
En bref, acheva-t-il, un monde dans lequel un sorceleur se sentirait comme un poisson dans l'eau.
-Le Sang ancien qui coule dans tes veines te donne la maîtrise du temps. Et de l'espace. Des dimensions et des sphères. Tu es maintenant la Dame des Mondes, Ciri. Tu possèdes une Force puissante. Ne permets pas qu'on te l'enlève ou qu'on en profite à des fins personnelles criminelles et indignes.
-Je ne le permettrai pas.
-Adieu, Ciri. Adieu, Hirondelle.
-Adieu, Vieux Corbeau.
Les patins crissent, crissent, crissent.
Le silence.
-Le tour de l'Hirondelle, c'est une légende. Souviens-toi, ce n'est qu'une légende.
-Moi aussi je ne suis qu'une légende, répliqua-t-elle d'un ton amer. Depuis ma naissance. Zireael, l'Hirondelle, l'Enfant-Surprise. L’Élue. L'enfant de la Destinée. L'enfant de Sang ancien...