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Critique de indimoon


Autant "L'aveuglement" m'a subjuguée du début à la fin de part la forme stylistique si particulière de l'auteur, et le fond de satire politique si puissant, autant j'ai failli abandonner La lucidité dans les 80 premières pages. Pourtant, forme et fond s'y retrouvent, comme je l'avais lu sur Babelio, La lucidité faisant suite à L'aveuglement.
Ceci dit, ce n'est pas flagrant au départ, puisqu'il faut attendre plus de la moitié du livre pour que des références à "la peste blanche", quatre années auparavant, soient de plus en plus nombreuses, en écho au mal dont semblent atteints "les électeurs de la capitale", nommés de façon méprisante par le gouvernement "les blanchards", qui ont voté blanc à 70%, puis à 83% lors des deux tours consécutifs des élections municipales. Dans un troisième temps après ces références, entrent en scène les personnages de L'aveuglement.
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C'eut été une erreur de déclarer forfait avec La lucidité, même si les premières pages m'ont étouffée. J'ai eu l'impression d'assister en catimini à un conseil des ministres sans fin, sauf que je n'ai jamais eu pour passe-temps de visionner l'Assemblée Nationale le mercredi aprèm à la télé, pas même pour ironiser sur ce qui ressemble à des bassesses liées à des dessous de cartes, pots de vin, et peaux de vaches, entre deux chamailleries de cour d'école, et deux ronflements de ceux qui y participent et que cela passionne autant que moi.
Saramago sait toutefois rendre l'exercice cocasse, et ses portraits vitriolés des politiciens ont de quoi réjouir - ou déprimer c'est selon. J'ai souvent lu qu'ils sont caricaturaux, mais quand on a concrètement vécu une période de troubles comme le Covid, on se rend compte que la caricature n'est pas si loin de la réalité, comme on pouvait le craindre -.
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le gouvernement réagit à cette mystérieuse désertion des urnes avec une affliction feinte et rapidement menaçante. La ville lui répond avec une unanimité stupéfiante, d'autant plus respectable qu'elle est digne et pacifiste... Ce qui va pousser l'état à mettre de sales projets à exécution pour retrouver sa légitimité auprès de l'opinion publique. Il y a quasiment, en plus de la satire politique, une dimension sociologique à regarder évoluer cette ville aussi effrontée qu'unie, un personnage attachant en butte à l'autorité.
Et au moment même où je m'attache à ce personnage de la ville, cherchant à comprendre les ressorts de sa colère sourde, curieuse de ce qu'il adviendra d'elle, Saramago ressort enfin du chapeau, la femme du médecin, le chien des larmes, et leurs acolytes, qu'il me tardait tant de retrouver. C'est comme un deuxième récit qui s'enchâsse et chasse le premier, et je suis autant contente de retrouver ces personnages, que frustrée de quitter le destin de cette ville; au final. Existerait-il un troisième tome qui ressort la ville du chapeau ? Une troisième déclinaison de la fourbe couleur blanche en politique ? ^^
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Le pire c'est que finalement, dans ce roman, Saramago agit avec la même désinvolture avec tous ses personnages.
La démonstration est certes édifiante, comme je l'ai déjà publié en citation "on ne peut pas faire cas de ce qui est incompréhensible, sauf si cela peut servir de prétexte." (p288), et les rouages du récits sont implacables, magnifiquement déployés, dans ce sens. Mais il m'a manqué beaucoup d'autres éléments qui ont fait l'incroyable densité et richesse de L'aveuglement.
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