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Citations sur Ingrid Caven (9)

Elle roule un peu les r, le reste est dans le masque. Elle fait glisser dans sa langue une autre langue, celle de son propre corps. Elle commence une phrase avec un accent althochdeutsch, haut allemand, la termine dans une sonorité yiddish, et passe, en un instant, de l’Université à la cuisine. Elle conjugue les genres, elle aime les mélanges, ce changement de ton à l’intérieur d’une chanson. Elle avance vers la rampe, cinq doigts écartés sur la hanche : le geste des premières chanteuses de saloon parodiant les cow-boys, main sur la crosse du colt, buste un peu cassé, voix poissarde. Tout en marchant d’un pas trainant, elle ramasse la longue traine de la robe, la tient roulée, chiffonnée, sur le bras, ça lui découvre les jambes, soudain c’est une mini ! Parfois, elle en a assez de cette grande robe, de tout ce noir !
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Elle avait réinventé son corps pour cause de maladie, invalidité, un triste état, il était meurtri, une carapace, un masque qui l'isolait et la rendait vulnérable à la fois, les choses lui étaient étrangères, trop loin et trop près, menaçantes, elle n'y était pas chez elle.
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Animée, inventée à chaque instant sous les projecteurs, comme l'est une marionnette, sauf qu'elle était vivante et très vivante et qu'elle passait d'ailleurs d'un état à l'autre vite en mélangeant la femme et le pantin, et le pantin c'était elle aussi.
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Lupe Velez était la fiancée de Johnny Weissmuller, après un chagrin d'amour avec Tarzan elle veut se suicider, mais en beauté, toujours l'image, même post-mortem, coiffure, maquillage pendant des heures. Manque de chance, les comprimés et l'alcool lui détraquent les boyaux et c'est dans sa plus belle robe, ses superbes toilettes, poudrée, bijoutée, quasiment embaumée, qu'on retrouve l'exotique momie mexicaine, étouffée par son vomi la tête dans les chiottes. C'est ça l'art de la brisure, toute une tournure d'esprit, comme l'art inverse, de récupérer les restes, et c'est vrai qu'un ustensile de cuisine ça peut toujours servir : John Cage a composé un concerto pour moule et fouet à pâtisserie.
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"Si, si, à 8 heures...quand le jour se lève, alors l'oreille est vierge, pas encore polluée par les bruits, les conversations, la cacophonie, elle est ultra sensible aux notes, c'est à l'aube qu'il faut écouter la musique!"
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Elle longeait le bord de la mer à marée basse, en chantant, en sandales pieds nus, le vacarme de l'océan l'empêchait d'entendre sa voix.
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Les bombes à Kiel avaient été pour moi un mélange d'excitation et d'angoisse, les ruines après guerre, quelques chose de formidable pour un enfant, jusqu'à ce que j'apprenne, pour les camps...
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C'est déjà la nuit souvent quand la petite musicienne traverse en tramway, elle a six, sept ans, toute la ville à moitié en ruine, le fleuve Saar, immeubles aux façades aveugles, fenêtres et portes obturées par des planches, le pont au-dessus des voies ferrées où passent les trains qui relient le Rhin à la France, Forbach juste à côté, puis un quart d'heure de marche : elle longe les murs du vieux château dont l'arrière donne en à-pic sur l'abîme, elle monte le large escalier d'un immeuble ancien et sonne chez Walter Gieseking, cartable avec les partitions dans une main, boîte de cigares dans l'autre : vingt-cinq cigares contre leçon de piano.
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Oui, elles étaient toutes là, comme pour une première, ses actrices, ses femmes, car toutes avaient été amoureuses de lui, d'une façon ou d'une autre. Il aurait d'ailleurs pu séduire n'importe qui, homme ou femme. Et après tout, il les avait fait parler, bouger, remuer un peu, dire parfois quelque chose de piquant, d'amusant, il les avaient manipulées, en bon marionnettiste, elles qui autrement n'étaient que des masochistes sans emploi, attendant leur maître, mais ils les avaient choisies pour ça, justement, pour leur ridicule fatuité, leur mièvrerie empotée, leurs grands airs faussement tragiques, pleines de certitudes, faisant tout sans poser de questions, no problem, la carrière d'abord, froides et calculatrices au fond : la femme allemande d'après-guerre, l'Allemagne, avec qui il n'arrêtait pas de régler ses comptes.
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