Au début, l'œuvre donne une impression d'inachevé, mais elle prend peu à peu de la profondeur à mesure qu'on s'en sert.
Comme si elle et son utilisateur accomplissaient une harmonie ensemble.
Comme un couple assorti.
Nous nous installons face à face. En mangeant, nous bavardons tranquillement. Les fenêtres et la porte d'entrée sont ouvertes. Une brise fraiche passe. On entend le gazouillis des mésanges. Je souhaite que le temps s'arrête.
Je marche sur le sentier menant à la maison de mes parents. Le chemin n'est pas asphalté, et de chaque côté poussent librement des fleurs et des herbes sauvages. Rien n'a changé depuis mon enfance.
La poterie est indispensable à ma vie. En pétrissant de l'argile avec mes mains puis en façonnant une pièce, j'oublie tout ce qui se passe autour de moi.
Il annonce fièrement :
- Le suzuran s'appelle "Lily of the valley" en anglais, et "muguet" en français.
- Comment connais-tu ces mots étrangers ?
- Par grand-mère.
- Vraiment ?
Il hoche la tête et ajoute :
- Ah, il y a un autre mot en français : "amourette".
— On adore le suzuran (muguet). Mais il ne faut pas oublier qu’il est toxique et peut même être mortel si l’on mage son périanthe, c’est-à-dire le calice et la corolle. […]
— Oui, sa toxicité est quinze fois plus forte que celle du cyanure de potassium. Même l’eau du vase, même la plante fanée et desséchée sont toxiques.
(Léméac/Actes Sud, p.47)
« Tu m'appelles sans voix
Comme une clochette sans battant
J'entends tout, Suzuran... »
La poterie est indispensable à ma vie. En pétrissant de l’argile avec mes mains puis en façonnant une pièce, j’oublie tout ce qui se passe autour de moi. (...) "Choisissez un travail que vous aimez et vous n'aurez pas à travailler un seul jour de votre vie", a dit Confucius. Il avait tout à fait raison. (p. 9)
En buvant, je jette un œil vers les suzuran [muguet] dans le bocal en verre posé sur le rebord de la fenêtre. J’admire ces petites fleurs blanches en forme de clochette. Bien que son apparence soit fragile, cette plante est d’une fécondité extraordinaire. D’après Yûji, elle est toxique et même fatale.
Un vent tiède souffle. Je me tourne vers la mer du Japon. Le soleil couchant commence à disparaître à l’horizon. Les nuages éparpillés sont teintés d’écarlate. Il fera beau demain aussi. Au loin à droite se dresse le mont Daisen au sommet enneigé. Le paysage est toujours paisible comme si le temps ne passait jamais ici, alors que ma vie a totalement changé depuis quatre ans.