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Critique de Bobby_The_Rasta_Lama


"Long périple qui est le tien, Gilgamesh ! Et pour quelle victoire ? Jamais tu ne trouveras la vie que tu cherches.
- Je compte y parvenir, divin prince.
- Ah, Gilgamesh, Gilgamesh, pauvre fou !"

Gilgamesh, ou la quête d'immortalité d'un grand roi...
Je n'ai lu jusqu'à présent qu'un seul livre de Silverberg, "Les temps parallèles", et j'étais agréablement surprise : c'est un petit roman SF qui vous fait voyager un peu partout dans le temps, mais surtout à Byzance. Avec "Gilgamesh, roi d'Ourouk", oubliez la SF, mais préparez vous à voyager encore plus loin : une vingtaine de siècles avant Homère, aux temps de Sumer, berceau de l'écriture et de la civilisation qui nous a laissé des fragments de tablettes avec la légende de Gilgamesh. le premier "super-héros" connu de l'histoire de l'humanité, il y a presque 3000 ans. Il n'est pas étonnant qu'il ait retenu l'attention de Silverberg !

Chose étrange : l'auteur respecte scrupuleusement la trame originale de la véritable épopée, telle qu'elle était assemblée à partir de divers fragments dans sa version akkadienne. Mais là où la version originale nous parle des dieux, monstres et manifestations surnaturelles, Silverberg opte pour un récit réaliste à la première personne, et choisit toujours une explication rationnelle. Alors, qui sait ? Cela aurait vraiment pu se passer comme ça...
D'autant plus que les héros de l'épopée - Gilgamesh, son père Lugalbanda et son grand-père Enmerkar, Agga le roi de Kish, et bien d'autres - sont souvent mentionnés sur les stèles sumériennes en tant que personnes réelles. Pour plus d'authenticité, Silverberg va choisir l'ancienne version sumérienne des noms propres (Ishtar babylonienne reste Inanna, le monstre Humbaba redevient Huwawa, et le célébre Uta-Napishtim, l'unique survivant du Déluge, se nomme Ziusoudra, dans le livre). Si vous connaissez déjà l'épopée, vous avez probablement lu une traduction de la version akkadienne, ultérieure à l'original, qui ordonne les fragments pour former une histoire cohérente.
De plus, Silverberg émaille son livre de mythes et croyances sumériennes : les rivalités entre les dieux, la descente d'Inanna aux Enfers, la création du monde et de ses habitants, et bien sûr, le Déluge, étonnamment ressemblant au récit biblique. Cela permet de comprendre davantage la mentalité de cet étrange monde archaïque.

Tout est donc réuni pour une excursion derrière les remparts d'Ourouk, quelque part aux alentours de 2500 av. J. -C.
Gilgamesh est un colosse qui ne connaît ni peur ni fatigue, de deux-tiers divin et d'un tiers humain. Il devient roi après une enfance mouvementée, et il règne en despote éclairé sur sa cité prospère. Il possède mille femmes, mais la seule qui l'obsède, la grande prêtresse d'Inanna, lui reste inaccessible. Il a mille courtisans, mais il se sent désespérément seul. Cela va changer quand il se lie d'amitié avec Enkidou, un homme sauvage, le seul qui l'égale en force, et qui va devenir son alter-ego rempli de joie de vivre.
Ils vont traverser bien des épreuves et terrasser plus d'un démon ensemble, mais il faut se méfier de la vengeance des dieux, et Enkidou meurt. C'est à ce moment-là que Gilgamesh réalise que la mort nous attend tous - une chose inacceptable - et il quitte Ourouk à la recherche de la vie éternelle.

Tandis que la première partie est brutale et héroïque, la deuxième, plus posée, est faite d'errances, rencontres, et réflexions existentialistes bien avant Sartre, Camus ou Kafka. La vie et la mort : une question qui taraude l'humanité depuis toujours. La vie humaine a t-elle un sens ? Peut-on éviter la mort ? Gilgamesh va se rendre aux confins du monde pour chercher des réponses.
Est-ce que la tavernière Sidouri va le convaincre avec sa vision hédoniste ? Ou faudrait-il aller encore plus loin, pour trouver le sage Ziusoudra, à qui les dieux ont accordé l'immortalité ?
Gilgamesh trouvera sa réponse, et vous aussi, si vous lisez le roman. Non seulement parce que cette épopée, très bien rendue par Silverberg, fait partie de notre patrimoine culturel. Mais aussi parce que dans cette culture, tellement ancienne qu'on n'arrive même pas à l'imaginer, où les gens vivaient au rythme des inondations et de la sécheresse; au rythme de leurs dieux et de la magie, les héros se posaient des questions qui sont toujours d'actualité.

4/5 pour le grand roi Gilgamesh, et un remerciement au roi Thimi, qui m'a donné envie de lire le livre, il y a à peu près 2500 ans.
Chaque chose en son temps, Gilgamesh, puisque la mort n'existe pas...
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