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Critique de Dandine


Simenon aime les gens simples, les “monsieur tout-le-monde". Il aime les decrire quand le destin leur joue des tours, ou leur propose une aubaine (des fois c'est une et meme chose). Quand ils ne savent comment agir ou qu'ils agissent contrairement a leurs vieilles habitudes. Sans s'en rendre vraiment compte ou au contraire repondant a un besoin momentane de revolte.

Pour Marcel Feron, la guerre et l'exode oblige de son petit bled en Meuse vers le sud, vers l'inconnu, sont l'occasion d'oublier – momentanement? – la calme routine de sa vie. Une routine voulue, apaisante, mais insipide. Il sent que ce chamboulement lui est specialement adresse: “c'etait une affaire personnelle entre le destin et moi”.

Dans le train qui les mene vers le sud il est rapidement separe de sa femme et de sa fille. Il se retrouve dans un wagon surpeuple ou toute ancienne regle de conduite devient vite desuete, ou toute honte s'efface. Quelques gestes de solidarite qu'il entame envers une inconnue reservee deviennent en quelques jours une addiction. Ils se collent, ils se soudent, ils s'agglomerent. Amour? Pas vraiment. Aucune transgression non plus, dans ce train cette notion n'est pas de mise. Une aventure existentielle que le destin qu'il invoquait lui a concocte. Une experience nouvelle, differente de tout ce qu'il a connu et vecu. Va-t-elle tout chambarder? Une fois arrives a La Rochelle, il cherche et retrouve sa famille et un adieu un peu sec clot ce qui a ete un interlude, hors du temps, ne pouvant engager un quelconque avenir.

Il revient bientot dans son village, a son metier, a ses habitudes. Quand, une nuit, l'inconnue reapparait pour lui demander aide, il ne pourra, il ne voudra pas y repondre. Lachete? Presque pas. Il n'est pas fait pour se lancer dans les aleas de l'inconnu. Il ne peut engager ses petits achevements, surement pas sacrifier sa famille. Ce qu'il a vecu dans le train lui est cher, mais c'etait un entracte, que la guerre a permis. La guerre est un seisme qui perturbe tout, qui altere tout. Mais toute guerre a une fin.

Ce livre me rappelle La fuite de monsieur Monde, du meme auteur. Mr Monde avait voulu sa fuite, l'avait organisee, alors qu'ici le heros est traine par les circonstances. Mais dans les deux cas la fuite est temporaire, comblante en elle-meme, fructueuse car elle permet de revenir, tranquille, a ce qu'on a fui.

J'ai deja lu de meilleures relations de l'exode de 1940. Celle-ci est centree sur l'etrange sensation de liberte qu'il a pu provoquer chez certains fuyards. Et Simenon excelle a sonder les pensees et les reactions de ses congeneres en situations extremes. C'est toujours passionnant (pour finir avec un mot adapte a la trame).
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