Philippe Sollers s'appuie sur un philosophe inconnu du plus grand nombre (dont je suis) pour nous faire découvrir l'illuminisme, courant de pensée qui court-circuite la Révélation revendiquée par les principales religions instituées et pose au contraire le principe d'une relation directe entre l'être humain et le divin.
le siècle des Lumières s'achève. Dans "
L'homme de désir"
Louis-Claude de Saint-Martin, le philosophe inconnu, formule clairement cela : "Soit bénie, lumière brillante, splendeur visible de la lumière éternelle d'où ma pensée a reçu l'existence. Si ma pensée n'était pas une des tes étincelles, je n'aurais pas le pouvoir de te contempler".
En imaginant que le philosophe inconnu survit à son trépas, et en s'identifiant souvent avec lui,
Philippe Sollers nous délivre un ensemble de réflexions dont la disparité masque la cohérence probable. Parfois, j'ai perdu le fil sous tendu derrière les très courts chapitres dont les titres soulignent l'hétérogénéité : "Transmission, Missions, Indices, Mort, Révolution, Génie, Innocence, etc." Quand il en vient à la transparence, il dénonce l'immédiateté des informations, l'ère du "selfisme" et du "tout est à vendre".
S'appuyant sur les propos révolutionnaires de
Saint-Martin,
Philippe Sollers peint un portrait bien sombre de la société contemporaine. Il dénonce avec talent et férocité la décomposition générale de la société, la régression qui d'une "année d'ennui s'étend sur un siècle" et nous fait part de son dédain pour les Français qui "ne connaissent pas
Dante", de son admiration pour
De Gaulle, le "Général inconnu", traite de
Rimbaud,
Michel Houellebecq, joue sur les mots (Clio/clito), observe que le "réglage technique de la procréation est contemporain d'une catastrophe climatique", rapproche la date de la mort de Mozart (1791) de celle de
Rimbaud (1891) et la parution, un siècle plus tard, de son roman "
La fête à Venise" (1991) qui envoyait --déjà-- un signal illuministe qui aurait dû attirer l'attention de la critique littéraire, laquelle, comme d'habitude, n'a rien vu, etc.
Bref, une mosaïque à laquelle je n'ai pas compris grand-chose pour deux raisons : une connaissance insuffisante de l'itinéraire de
Philippe Sollers pour apprécier les nombreuses références ou allusions à sa propre histoire et une difficulté à apprécier des propos qui, quoique teintés d'humour, sont généralement sombres, désabusés et peu constructifs.