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Critique de motspourmots


Attention, voici une vraie curiosité proposée par Les éditions de L'Observatoire qui font le pari de remettre en lumière cette romancière australienne (1902 - 1983) méconnue en France mais fine connaisseuse des moeurs de notre pays pour avoir longtemps vécu en Europe. Splendeurs et Fureurs est un roman d'une rare densité, à la plume acérée, qui explore avec ironie les méandres de l'âme humaine en mettant en scène des personnages dont on ne sait jamais s'ils cachent leur profondeur sous une façade de superficialité... ou l'inverse.

Cela commence dans un train qui fait route vers Paris, au cours de l'hiver 1934. Elvira Western a décidé de quitter Londres et son mari, Paul pour rejoindre Oliver Fenton, un étudiant plus jeune qu'elle dans la capitale française. La jeune bourgeoise de vingt-neuf ans a cédé aux lettres enflammées du jeune homme et à son envie de prendre l'air. Au cours du voyage, elle fait la connaissance d'un italien, représentant de commerce en dentelles qui finit par s'incruster auprès du jeune couple adultère. Les journées défilent, entre flâneries dans les rues et découverte des cafés de Saint-Germain des prés au cours desquelles Oliver et Elvira croisent des personnages plus ou moins extravagants et représentatifs de la faune qui gravite dans un Paris pris entre le faste des années folles et la montée des idées socialistes tandis que l'Europe retentit déjà des poussées nationalistes. Petit à petit, Elvira en vient à douter de son choix tandis qu'Oliver délaisse ses études, s'enflamme pour les théories communistes et tombe sous le charme de la fille d'un antiquaire dont l'indépendance lui fait autant peur qu'elle l'attire. Un chassé-croisé incessant qui voit les protagonistes changer d'avis à chaque battement de cil...

Christina Stead met en scène des personnages féminins hauts en couleurs et porteurs de revendications d'indépendance qui prennent des formes très différentes mais néanmoins affirmées. Elle ausculte ainsi les rapports hommes - femmes en mettant face à la gent masculine (qui ne sort pas grandie, il faut le dire) des échantillons féminins bien plus futés que ces messieurs ne le pensent. Elvira, bourgeoise bovarysante est cependant bien loin d'être dupe des promesses d'Oliver et prend bien soin de ne pas rompre totalement le lien avec Paul. Blanche, la demi-mondaine ou Coromandel, l'artiste représentent d'autres facettes de la subtilité féminine. Face à elles, même le plus calculateur des hommes ne s'en tire pas si facilement...

Et puis il y a Paris, cette capitale qui bruisse et dont la romancière souligne l'effervescence non seulement artistique mais également intellectuelle, politique, économique, prenant notamment en compte les mutations technologiques qui impactent la vie quotidienne. Il y a une ambiance de fin de cycle, on sent pointer les difficultés, sociales mais également politiques. Et l'on mesure la fine connaissance de la romancière qui rend très bien ce contexte particulier des dernières années qui menèrent à la seconde guerre mondiale.

Alors oui, c'est une curiosité mais il faut parfois s'accrocher lorsque l'auteure s'offre des envolées digressives, notamment dans la dernière partie. Autant j'ai apprécié son regard mordant et sa férocité dans l'examen des rapports hommes - femmes, autant j'ai un peu décroché lors de ses descriptions de cauchemars ou de rêves alcoolisés qui emportent le lecteur vraiment très loin du propos central. Restent un style, une véritable acuité dans la façon de saisir l'époque et une intéressante singularité dans l'art de la mise en scène. Cela aurait été dommage de ne pas découvrir cette curiosité.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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