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Critique de Tricape


Ce petit livre contient la transcriptions de deux interviews de George Steiner (1929-2020) réalisées par Antoine Spire (né en 1946) en janvier 1997 et décembre 1998.

Jeune, George Steiner devait rédiger une note après la lecture de tout livre et la remettre à son père. Ce n'est qu'à cette condition qu'il pouvait recevoir un nouvel ouvrage à lire. Ce judicieux pensum a contribué à sa culture.

Juif, son père expliqua au jeune George qu'il "appartenait à un club dont on ne démissionne pas". Métaphore efficace...

le dialogue porte en partie sur l'État d'Israël, à propos duquel George Steiner dit avoir écrit peu après mai 1968 : "Cet état va torturer d'autres êtres humains. Il le devra, pour survivre". La discussion porte ensuite sur la question de l'amélioration (ou non) de l'être humain au fil des millénaires. La vision qu'avait le siècle de Lumières s'est trouvée totalement démentie par les destructions et barbaries massives du XXe siècle. Arthur Koestler considérait que notre cerveau contenait une petite partie éthique et rationnelle et un énorme arrière-cerveau bestial et plein d'instinct meurtriers ; il pensait qu'il faudrait "encore des millions d'années [...] pour que l'évolution morale rattrape nos techniques de destruction et d'agression".

le débat aborde ensuite le thème de la culture de masse versus celle de l'élite, du rap versus la musique "classique" (ce passage fait écho à l'essai "Bruits" de Jacques Attali) et pose la question de la démocratisation de la "haute culture" ?

On passe ensuite à une discussion animée sur Heidegger puis à celle du "poids sans fin de l'absence de Dieu" (référence à Kafka) : des génies tels que Michel-Ange, Shakespeare, Beethoven ou encore Picasso (qui disait en parlant de Dieu : "Cest lui le concurrent") reviendront-ils et, si oui, sous quelle forme ?

Vous trouverez dans ce recueil plein d'autres pistes de réflexion, notamment sur la fin de l'Histoire et celle du monde que d'aucuns semblent annoncer comme imminente et auxquels George Steiner répond en faisant remarquer que c'est précisément lors de la grande panique de l'an mille que l'on bâtissait de merveilleuses églises romanes et que l'on peignait d'inoubliables fresques apocalyptiques...

Si vous avez écouté plusieurs émissions de "Radioscopie", la considérable série culturelle de Jacques Chancel, vous retrouverez dans la lecture de ces entretiens la même impression d'avoir la chance d'être aspiré vers les hauteurs et le même plaisir d'entendre et d'apprendre.
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