AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Oeuvres, tome 2 : Valeurs et autres écrits historiques,.. (6)

La démarche de l'esprit allemand est profondément orientale, à la réflexion : plus on va dans le secret de l'Allemagne, plus on touche à l'Orient. De là leur manie des origines, leur invention de l'Arien, leur haine du Sémite, leur goût pour les Indes et la pensée védique. Par où ils ont conquis peu à peu l'Occident ; il repousse leurs armes et il cède à leur dialectique. Plus dans le vieil Orient que Goethe, Nietzsche est plus allemand.
Cette grande âme malheureuse voulait être impitoyable ; et elle appelle à présent toute pitié. La compassion l'eût indignée, sans doute. Il se fût irrité d'entendre Parsifal jusque dans son tombeau, et de le voir venir, seul vivant, sur les ruines tragiques des dieux, au crépuscule. Nietzsche s'est mépris : il a ignoré qu'une certaine compassion est pleine de révérence : il n'est point d'hommage à la douleur sans compassion : la plus pure est souvent la plus muette. Et quel amour ne trempe dans la pitié ? S'ils n'ont enfin pitié de lui, les hommes ne mettront pas de terme à la sublime misère de Prométhée : et ce héros de la grandeur, d'où tire-t-il sa puissance ? Nietzsche, ne vous irritez pas ; ne grondez point, comme l'ombre d'Achille : celui qui vous plaint, vous admire ; il comprend, à l'horreur de vos maux, la grandeur de votre tragédie. Une révérente compassion est le sourire même du coeur, jumelle de la sérénité, ce beau sourire de l'esprit. Là seulement la connaissance jouit de soi ; là, elle a son terme et se possède.
Commenter  J’apprécie          70
Partout, partout la mort, et la porte ouverte sur l'effrayant problème : la porte de feu, où se dresse le noir fantôme qui couvre de son ombre tout l'univers: "Pourquoi la conscience, pourquoi connaître la mort, puisque la nature est sans conscience, qu'elle subit la mort comme le temps, et ne le connaît pas ?" Ô nuits solitaires, nuits dévorantes, terribles tête-à-tête de la conscience et du pourquoi ?
[...] Je ne peux plus respirer dans ce charnier. Et pourtant j'ai le sens de l'éternité : son ivresse s'ouvre devant moi et m'emporte. Je communique avec elle depuis l'enfance. Mais aussi souvent elle me ravit et m'absorbe, aussi souvent elle me suffoque. Le terrible et total Pourquoi n'est plus un mur où l'univers s'écrase au choc, mais un tourbillon qui me dissout : reste un atome de souvenir, un diamant impalpable de moi-même qui suffit à la douleur et à la confrontation de l'anéantissement. Il ne peut pas se perdre dans les délices de l'éternel, celui qui ne veut pas s'anéantir soi-même.
Commenter  J’apprécie          40
Saint Mathurin priez pour eux, les fous et les médecins des fous ! Priez pour tous ceux qui ont égaré leur âme dans les prisons de la viande ! Ne donnez pas trop à ceux-ci aux dépens de ceux-là ! Venez en aide à ceux qui se croient les plus sages. Faites que le jet de la douche se tourne aussi contre ceux qui la lancent, et froide et roide, bien roide et bien froide ! Qu'il reste un peu et beaucoup d'eau pour les psychiâtres, les schiziâtres, les phéniâtres, les sophiâtres, les salaces freudogyniâtres, les psitocciâtres, et les cent autres espèces d'iâtres ! Suppléez vous-même à l'interminable litanie ! Priez pour tous, grand saint Mathurin, si toutefois vous n'êtes pas vous-même délivré de la vie, si vous avez encore, au plus loin de l'insondable, un regard pour ce monde des sages et des fous, de l'amertume et des hommes.
Commenter  J’apprécie          30
Ô chair, chair chaude et triste et tendre chair, pauvre et douce enivrée, toujours victime d'un éternel élan, toujours volant au bonheur ; belle de tout charme et de toutes promesses, vouée à te trahir en les trahissant toutes ; rieuse qui suce du sang, pleureuse qui peut rire encore ; que l'on t'aime d'être si périssable ; que tu es touchante d'être le caprice des caprices, plus sujette au changement et à la ruine que le pétale au vent ; toi qui n'est rien, sans qui pourtant le tout ne peut rien être ; chair de la fleur, chair de l'amour, chair de l'enfant, tiède jeu de l'esprit, doux mirage de l'âme, siège de la douleur, rose des vents.
Commenter  J’apprécie          30
Et voilà ce qui distingue les hommes en effet : ceux qui voient le bien dans la grandeur sont d'âme antique, fussent-ils nés d'hier. Les autres, qui confondent la grandeur dans une espèce d'hygiène sociale qu'ils nomment le bien, ceux-là sont esclaves par l'âme : gens de demain, et toute yancaille. Ils n'ont même pas le mauvais style de l'homme, tant ils sont privés de style. Ils sont nombre et matière. Ils sont la dune infinie, qui prétend convertir en pacage banal le jardin des Hespérides et peut-être assécher l'Océan. Les sables humains ne sont ni bons ni méchants. Ils n'ont même pas la force du mal, quand ils le font : un vent les pousse. Ils sont bien pis : ils sont médiocres, et les atomes sans nombre de l'universelle médiocrité. On n'y peut pas penser sans dégoût.
Commenter  J’apprécie          30
Mais il est une autre humiliation auprès de quoi tout l'univers humilié n'est rien. C'est le cœur qui s'humilie, et qui se retranche de tout l'amour qui le brûle et dont il est plein.
Commenter  J’apprécie          00




    Lecteurs (12) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Les Chefs-d'oeuvre de la littérature

    Quel écrivain est l'auteur de Madame Bovary ?

    Honoré de Balzac
    Stendhal
    Gustave Flaubert
    Guy de Maupassant

    8 questions
    11135 lecteurs ont répondu
    Thèmes : chef d'oeuvre intemporels , classiqueCréer un quiz sur ce livre

    {* *}