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Robert Parienté (Éditeur scientifique)
EAN : 9782221096666
992 pages
Robert Laffont (19/09/2002)
5/5   3 notes
Résumé :

Le tome 1 contient : Le Mythe napoléonien – Sur Alphonse Daudet – Autour de l’affaire Dreyfus – Autour de Voici l’homme – Autour de Sur la vie – Autour du Voyage du condottiere – Autour de Baudelaire – Tolstoï vivant – Idées et Visions – Péguy – Vue sur Cervantès et Don Quichotte – Autour de Shakespeare – Vues sur Debussy – Vues sur Maurice Ravel – Sur... >Voir plus
Que lire après Oeuvres, tome 2 : Valeurs et autres écrits historiques, politiques et critiques (1923-1948)Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le second volume de cette édition est en grande partie composé de portraits. Mais trois livres ont surtout retenu mon attention. le premier est un petit livre sur l'île de la Cité, une balade dantesque d'Ouest en Est sur ce petit bout de territoire au centre de la France : Cité, nef de Paris. Un livre de commande qui ne paye pas de mine, mais que je trouve joliment composé entre les descriptions de l'enfer du palais de justice et du paradis de Notre-Dame.
Le deuxième, c'est le livre éponyme : Valeurs. Suarès a constamment écrit des « livres de pensées », plus ou moins en vrac, plus ou moins aphoristiques, tout au long de sa vie. Ce sont des livres qui ne sont pas fait pour être lus de manière soutenue, il n'y a aucun enchaînement d'idées, peu de liens, ce sont des petits textes écrits au fil de la plume dans une totale liberté. Jusqu'ici je les avais peu appréciés. J'ai par contre été enthousiasmé par Valeurs. Sans être différents des précédents, il m'a paru intéressant en tant que reflet d'un esprit, celui de l'auteur, dans une époque bien précise, celle de l'entre-deux guerre. Juste après la première guerre mondiale, Suarès s'était calmé avec les « boches », et il commençait à s'en prendre un peu plus aux Américains et aux Russes, plus précisément au fordisme et au communisme, à tout ce qui peut réduire l'homme à l'état de termite ou d'automate, comme il dit. Mais à partir des années 1930, toujours dans cet esprit de réveiller les masses abêties par la technique, il en remet une couche sur les Allemands et par la même occasion les fascistes d'Italie. Il s'en prend vertement à Hitler, à Mussolini et à toutes les dictatures.
Il n'y a pas plus éminent représentant de l'esprit français que Suarès. Autant je le trouve parfois aigre et injuste dans ses portraits littéraires, et même indigne, autant sa sincérité est incomparable dans sa lutte pour la liberté individuelle. Il a mis le doigt sur le Mal, et il a bien appuyé dessus ; ce qui n'a rien d'extraordinaire, mais il l'a fait, et il a risqué sa vie. Je serais vraiment curieux de savoir comment il a réussi à survivre à la guerre, c'est un miracle qu'il ait pu échapper aux nazis. Peut-être le doit-il au peu d'attention que l'intelligentsia française lui accordait.
Il y a de ça dans Valeurs et d'autres sujets qui lui tenaient à coeur. C'est un grand livre, qui s'inscrit dans la lignée des Pensées de Pascal et des Essais de Montaigne : « La manière de Pascal, dans les Pensées, et de Montaigne est la meilleure. Je ne la choisis pas, elle m'est propre, à ma façon. Sans le vouloir, j'écris sur cette règle contre les règles ; sans le vouloir et, à la réflexion, le voulant. Je rêve d'un style qui perce en volant, qui ne s'attarde jamais, qui ne pèse rien, qui coupe les vaines amarres du lien tendu, de la transition, et du rigoureux enchaînement. Un discours qui se passe de tout développement et, s'il faut, qui en fasse fi. »
Enfin, le troisième et dernier livre, le tout dernier, son testament inachevé pourrait-on dire, puisqu'il n'a pas eu le temps de le finir et qu'il n'en a publié que quelques extraits, c'est le Paraclet. Il est intéressant parce qu'il résume toute la pensée religieuse et spirituelle de Suarès. Toujours dans son esprit individualiste, il rejette les églises, les théologies, la scolastique, et pourtant il s'inscrit dans une tradition catholique, particulièrement influencée par la pensée grecque : saint Paul et saint Jean. Il rejette tout ce qui vient après. le Paraclet c'est le Saint-Esprit dans la Bible grecque. On pourrait gloser infiniment sur ce qu'il écrit : sur la différence qu'il fait entre l'esprit et l'âme, sur l'éternité, sur la métempsychose et sur la part de liberté que peuvent conquérir les hommes, etc. Tout cela n'est pas simple. Quoi qu'il en soit, il croit au règne à venir du Paraclet, qui passe par « la connaissance rationnelle de l'immortalité », une métapsychique et une métaphysique que laisse entrevoir Bergson. Concrètement, chaque individu doit lutter en ce monde pour révéler son Moi, seul et unique.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
La démarche de l'esprit allemand est profondément orientale, à la réflexion : plus on va dans le secret de l'Allemagne, plus on touche à l'Orient. De là leur manie des origines, leur invention de l'Arien, leur haine du Sémite, leur goût pour les Indes et la pensée védique. Par où ils ont conquis peu à peu l'Occident ; il repousse leurs armes et il cède à leur dialectique. Plus dans le vieil Orient que Goethe, Nietzsche est plus allemand.
Cette grande âme malheureuse voulait être impitoyable ; et elle appelle à présent toute pitié. La compassion l'eût indignée, sans doute. Il se fût irrité d'entendre Parsifal jusque dans son tombeau, et de le voir venir, seul vivant, sur les ruines tragiques des dieux, au crépuscule. Nietzsche s'est mépris : il a ignoré qu'une certaine compassion est pleine de révérence : il n'est point d'hommage à la douleur sans compassion : la plus pure est souvent la plus muette. Et quel amour ne trempe dans la pitié ? S'ils n'ont enfin pitié de lui, les hommes ne mettront pas de terme à la sublime misère de Prométhée : et ce héros de la grandeur, d'où tire-t-il sa puissance ? Nietzsche, ne vous irritez pas ; ne grondez point, comme l'ombre d'Achille : celui qui vous plaint, vous admire ; il comprend, à l'horreur de vos maux, la grandeur de votre tragédie. Une révérente compassion est le sourire même du coeur, jumelle de la sérénité, ce beau sourire de l'esprit. Là seulement la connaissance jouit de soi ; là, elle a son terme et se possède.
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Partout, partout la mort, et la porte ouverte sur l'effrayant problème : la porte de feu, où se dresse le noir fantôme qui couvre de son ombre tout l'univers: "Pourquoi la conscience, pourquoi connaître la mort, puisque la nature est sans conscience, qu'elle subit la mort comme le temps, et ne le connaît pas ?" Ô nuits solitaires, nuits dévorantes, terribles tête-à-tête de la conscience et du pourquoi ?
[...] Je ne peux plus respirer dans ce charnier. Et pourtant j'ai le sens de l'éternité : son ivresse s'ouvre devant moi et m'emporte. Je communique avec elle depuis l'enfance. Mais aussi souvent elle me ravit et m'absorbe, aussi souvent elle me suffoque. Le terrible et total Pourquoi n'est plus un mur où l'univers s'écrase au choc, mais un tourbillon qui me dissout : reste un atome de souvenir, un diamant impalpable de moi-même qui suffit à la douleur et à la confrontation de l'anéantissement. Il ne peut pas se perdre dans les délices de l'éternel, celui qui ne veut pas s'anéantir soi-même.
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Saint Mathurin priez pour eux, les fous et les médecins des fous ! Priez pour tous ceux qui ont égaré leur âme dans les prisons de la viande ! Ne donnez pas trop à ceux-ci aux dépens de ceux-là ! Venez en aide à ceux qui se croient les plus sages. Faites que le jet de la douche se tourne aussi contre ceux qui la lancent, et froide et roide, bien roide et bien froide ! Qu'il reste un peu et beaucoup d'eau pour les psychiâtres, les schiziâtres, les phéniâtres, les sophiâtres, les salaces freudogyniâtres, les psitocciâtres, et les cent autres espèces d'iâtres ! Suppléez vous-même à l'interminable litanie ! Priez pour tous, grand saint Mathurin, si toutefois vous n'êtes pas vous-même délivré de la vie, si vous avez encore, au plus loin de l'insondable, un regard pour ce monde des sages et des fous, de l'amertume et des hommes.
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Et voilà ce qui distingue les hommes en effet : ceux qui voient le bien dans la grandeur sont d'âme antique, fussent-ils nés d'hier. Les autres, qui confondent la grandeur dans une espèce d'hygiène sociale qu'ils nomment le bien, ceux-là sont esclaves par l'âme : gens de demain, et toute yancaille. Ils n'ont même pas le mauvais style de l'homme, tant ils sont privés de style. Ils sont nombre et matière. Ils sont la dune infinie, qui prétend convertir en pacage banal le jardin des Hespérides et peut-être assécher l'Océan. Les sables humains ne sont ni bons ni méchants. Ils n'ont même pas la force du mal, quand ils le font : un vent les pousse. Ils sont bien pis : ils sont médiocres, et les atomes sans nombre de l'universelle médiocrité. On n'y peut pas penser sans dégoût.
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Ô chair, chair chaude et triste et tendre chair, pauvre et douce enivrée, toujours victime d'un éternel élan, toujours volant au bonheur ; belle de tout charme et de toutes promesses, vouée à te trahir en les trahissant toutes ; rieuse qui suce du sang, pleureuse qui peut rire encore ; que l'on t'aime d'être si périssable ; que tu es touchante d'être le caprice des caprices, plus sujette au changement et à la ruine que le pétale au vent ; toi qui n'est rien, sans qui pourtant le tout ne peut rien être ; chair de la fleur, chair de l'amour, chair de l'enfant, tiède jeu de l'esprit, doux mirage de l'âme, siège de la douleur, rose des vents.
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Vidéo de André Suarès
CHAPITRES : 0:00 - Titre
A : 0:06 - ACTE - Jacques Deval 0:16 - ACTION - Sacha Guitry 0:28 - ADMIRATION - Comtesse Diane 0:38 - ADULTÈRE - Daniel Darc 0:59 - ÂGE - Fabrice Carré 1:08 - AMI - Jean Paulhan 1:18 - AMIS - Madame du Deffand 1:30 - AMOUR - André Birabeau 1:40 - AMOUR - Madeleine de Scudéry 1:51 - AMOUR DES FEMMES - Edmond Jaloux 2:03 - AMOUR ET FEMMES - Paul Géraldy 2:16 - AMUSEMENT - Jean Delacour 2:36 - ANIMAL - André Suarès 2:47 - APPARENCE - Nathalie Clifford-Barney 2:57 - ARGUMENT - Léonce Bourliaguet 3:07 - AVARICE - Abel Bonnard 3:19 - AVENIR - Gustave Flaubert 3:28 - AVIS - Marie d'Arconville
B : 3:37 - BAISER - Tristan Bernard 3:49 - BEAUTÉ - Fontenelle 4:00 - BÊTISE - Valtour 4:13 - BIBLIOTHÈQUE - André de Prémontval 4:24 - BLASÉ - Louise-Victorine Ackermann 4:35 - BONHEUR - Henri Barbusse 4:45 - BUT - Richelieu
C : 4:54 - CAPITAL - Auguste Detoeuf 5:10 - CERVEAU - Charles d'Ollone 5:20 - CHANCE - Pierre Aguétant 5:31 - COMPRENDRE - Charles Ferdinand Ramuz 5:42 - CONSEIL - Maurice Garçot
5:55 - Générique
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Jean Delacour, Tout l'esprit français, Paris, Albin Michel, 1974.
IMAGES D'ILLUSTRATION : Jacques Deval : http://www.lepetitcelinien.com/2013/06/lettre-inedite-louis-ferdinand-celine-jacques-deval.html Sacha Guitry : https://de.wikipedia.org/wiki/Sacha_Guitry#/media/Datei:Sacha_Guitry_1931_(2).jp Comtesse Diane : https://www.babelio.com/auteur/Marie-Josephine-de-Suin-dite-Comtesse-Diane/303306 Jean Paulhan : https://jeanpaulhan-sljp.fr/ Madame du Deffand : https://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_du_Deffand#/media/Fichier:Mme_du_Deffant_CIPA0635.jpg André Birabeau : https://fr.wikipedia.org/wiki/André_Birabeau#/media/Fichier:André_Birabeau_1938.jpg Madeleine de Scudéry : https://www.posterazzi.com/madeleine-de-scudery-n-1607-1701-french-poet-and-novelist-wood-engraving-19th-century-after-a-painting-by-elizabeth-cheron-poster-print-by-granger-collection-item-vargrc0078786/ Edmond Jaloux : https://excerpts.numilog.com/books/9791037103666.pdf Paul Géraldy : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Géraldy#/media/Fichier:Paul_Géraldy_by_André_Taponier.jpg André Suarès : https://www.edition-originale.com/fr/litterature/divers-litterature/suares-correspondance-1904-1938-1951-79921 Nathalie Clifford-Barney : https://www.amazon.fr/Eparpillements-Natalie-Clifford-Barney/dp/B081KQLJ87 Léonce Bourliaguet : https://www.babelio.com/auteur/Leonce-Bourliaguet/123718/photos Abel Bonnard : https://twitter.com/wrathofgnon/status/840114996193329153 Gustave Flaubert : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/ea/
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