Citations sur La corbeille de fruits (21)
Je me suis réveillé et j’ai trouvé sa lettre avec le matin.
Je ne sais pas ce qu’elle dit, car je ne sais pas lire.
Je laisserai le sage seul avec ses livres, je ne le dérangerai pas, car qui sait s’il pourra lire ce que dit la lettre.
Laissez-moi la tenir sur mon front et la presser contre mon cœur.
Quand la nuit sera calme et que les étoiles apparaîtront une à une, je la poserai sur mes genoux et je resterai silencieux.
Le bruissement des feuilles me la lira à haute voix, le ruisseau la chantera, et les sept étoiles sages me la chanteront du ciel.
Je ne trouve pas ce que je cherche, je ne comprends pas ce que je voudrais apprendre, mais cette lettre non lue a allégé mes fardeaux et transformé mes pensées en chansons…
Je prononcerai ton nom, solitairement assis au milieu des ombres de mes silencieuses pensées.
Je le prononcerai sans paroles, je le prononcerai sans raison.
Car je suis pareil à l'enfant qui appelle sa mère cent fois, heureux de pouvoir répéter "Maman".
Toujours, tu te tiens solitaire par delà les ondes de mes chants.
Les vagues de mes harmonies baignent tes pieds,
mais je ne sais comment les atteindre.
Et ce que je joue pour toi est une musique trop lointaine.
C'est la douleur de la séparation qui s'est faite mélodie : elle chante par ma flûte.
Et j'attends l'heure où ta barque traversera l'eau jusqu'à mon rivage,
et où tu prendras ma flûte dans tes mains.
Écoute, mon coeur ; dans cette flûte chante
la musique du parfum des fleurs sauvages,
des feuilles étincelantes et de l'eau qui brille;
La musique d'ombres sonores, d'un bruit d'ailes
et d'abeilles.
La flûte a ravi son sourire des lèvres
de mon ami et le répand sur sa vie.
Cet amour entre nous n'est point un simple
badinage, mon aimé.
Encore et encore les nuits rugissantes
des tempêtes se sont abattues sur moi,
éteignant ma lumière ;
des doutes noirs se sont amassés, effaçant toutes les étoiles de mon ciel.
Encore et encore les digues ont été rompues, laissant les flots balayer mes moissons,
et les plaintes et le désespoir ont déchiré mon ciel de part en part.
Et j'ai appris que dans votre amour,
il y a des coups douloureux, mais jamais
l'apathie glacée de la mort.
La fête de l’été ne concerne-t-elle que les fleurs fraîches et non les feuilles fanées et les fleurs fanées ?
Le chant de la mer ne s’accorde-t-il qu’avec les vagues qui montent ?
Ne chante-t-elle pas aussi avec les vagues qui tombent ?
Des joyaux sont tissés sur le tapis où se tient mon roi, mais il y a des mottes patientes qui attendent d’être touchées par ses pieds.
Peu nombreux sont les sages et les grands qui s’assoient auprès de mon Maître, mais il a pris les insensés dans ses bras et a fait de moi son serviteur pour toujours.
Ma vie, quand j’étais jeune, était comme une fleur – une fleur qui perd un ou deux pétales de son abondance et ne ressent jamais la perte quand la brise du printemps vient mendier à sa porte.
Maintenant, à la fin de la jeunesse, ma vie est comme un fruit, n’ayant rien à épargner, et attendant de s’offrir complètement avec toute sa douceur.
Dis-moi et je cueillerai mes fruits pour les apporter dans des paniers pleins dans ta cour, même si certains sont perdus et d’autres pas mûrs.
Car la saison est lourde de sa plénitude, et l’on entend dans l’ombre le son plaintif de la flûte du berger.
Dis-moi, et je m’embarquerai sur le fleuve.
Le vent de mars est capricieux, et transforme les vagues languissantes en murmures.
Le jardin a tout donné, et à l’heure lasse du soir, l’appel vient de votre maison sur la rive, au coucher du soleil.
Durant plus d'un jour de paresse
Durant plus d'un jour de paresse j'ai pleuré sur le temps perdu. Pourtant il n'est jamais perdu, mon Seigneur ! Tu as pris dans mes mains chaque petit moment de ma vie. Caché au coeur des choses, tu nourris jusqu'à la germination la semence, jusqu'à l'épanouissement le bouton, et la fleur mûrissante jusqu'à l'abondance du fruit. J'étais là, sommeillant sur mon lit de paresse et je m'imaginais que tout ouvrage avais cessé. Je m'éveillai dans le matin et trouvai mon jardin plein de merveilles et de fleurs.
Ainsi le désir de vivre est une grande vérité,
Et l'adieu absolu, une autre grande vérité.
Pourtant doit se produire entre eux une harmonie !
Sinon la création
N'aurait pu supporter si longtemps souriante
L'énormité de la fraude !
Sinon la lumière aurait déjà noirci, comme la fleur dévorée par le ver !
Le même fleuve de vie
Qui court à travers mes veines nuit et jour
Court à travers le monde
Et danse en pulsations rythmées.
C'est cette même vie qui pousse à travers
La poudre de la terre sa joie
En innombrables brins d'herbe,
Et éclate en fougeuses vagues de feuilles et de fleurs..
C'est cette même vie que balancent flux et reflux
Dans l'océan-berceau de la naissance et de la mort.
Je sens mes membres glorifiés au toucher de cette vie universelle.
Et je m'enorgueillis,
Car le grand battement de la vie des âges
C'est dans mon sang qu'il danse en ce moment.
Je saisis ma lampe terrestre, et, sortant de la maison, je criai : " Venez, enfants, j'éclairerai votre sentier ! "
La nuit était encore profonde lorsque je m'en revins, laissant la route à son silence, et criant : " Eclaire-moi, ô divin feu ! car ma lampe terrestre gît brisée dans la poussière ! " - 158 -