Jusqu'à mes vingt ans, mes poèmes n'ont eu que trois lecteurs.
Le premier lecteur, c'était moi.
Je lisais très attentivement les poèmes écrits par moi, puis j'adressais une lettre d'admiration à leur auteur.
[...]
Le deuxième lecteur était ma mère.
Chaque fois que j'écrivais un poème, je le lui postais, et en retour elle m'envoyait en recommandé une enveloppe avec des espèces.
Ma mère interprétait mes poèmes comme des demandes d'argent.
Si n’importe qui est moi je ne suis pas moi. Mais si je suis moi, personne n’est moi. Si personne n’est moi, qui suis-je
Henri IV est un affreux matou géant noir qui boit des cocktails lait-vodka avant de s’endormir à nos pieds
L’homme comprenait maintenant que les amants ont besoin de noms. Pas des noms choisis par leurs parents, des noms sélectionnés par eux seuls.
J’enseigne la poésie dans une école de poésie.
Cela me fait bizarre de dire : "J’enseigne la poésie dans une école de poésie". Je me sens tel un groom du vieil Imperial Hotel de Tokyo qui, raide comme un piquet, porte une bière glacée sur un plateau et fait de son mieux pour ne pas perdre contenance tandis que juste à côté de lui Katharine Ross fait ses ablutions intimes sur son bidet portatif.
Des tapis roulants, énormes comme il se doit, filaient à travers la célèbre usine d’automobiles. Nous les appelions "lignes".
Tout ce qu’il est possible d’imaginer filait devant nous sur sa ligne.
Une ligne filait, transportant le sable destiné aux moules des moteurs à quatre cylindres.
Une ligne filait, transportant les châssis.
Une ligne filait, transportant les arbres.
Une ligne filait, transportant les essuie-glaces.
Une ligne filait, transportant les tachymètres.
Une ligne filait, transportant les disques d’embrayage.
Une ligne filait à toute vitesse, transportant une ligne transportant des brochures nous avisant de ne pas oublier d’injecter de l’huile autour de l’axe pivotant une fois tous les quatre mois, et une autre ligne nous avisant de ne pas oublier de vérifier la quatrième vis à partir de la droite sur le cadre du pare-brise.
Une ligne filait, transportant le chef de section qui me bourrait les côtes de coups parce que je m’étais assis pour observer une ligne transportant une ligne transportant quelque objet inidentifiable.
Héraclite, qui a dit : "Tout se meut sans cesse", devait travailler dans la célèbre usine d’automobiles, il ne peut en aller autrement.
Pour ce qui me concerne, les lits sont destinés à faire l'amour, à s'endormir en se tenant par la main ou à servir de barricade si on les retourne et rien de plus.
Il fut un temps où chacun avait un nom. Et on dit que les gens recevaient leur nom de leurs parents.
Je l'ai lu dans un livre.
Il y a peut-être longtemps, très longtemps, c'était vraiment comme ça.
Les gens avaient des noms exactement pareils à ceux des personnages des romans célèbres, des noms comme Piotr Verkhovenski et Oliver Twist et Jack Oshinumi.
Je parie que ça devait être génial.
Pour ce qui me concerne, les lits sont destinés à faire l’amour, à s’endormir en se tenant la main ou à servir de barricade quand on les retourne, et rien de plus.
Je ne savais pas qu’un dos de femme pouvait être aussi ravissant.