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Critique de afleurdemots


Bien que Barbara Taylor Bradford se défende de s'être inspirée de la série à succès Downton Abbey pour écrire son histoire, difficile de ne pas relever les nombreux points communs entre les deux oeuvres. Outre le contexte historique parfaitement identique, certains personnages du roman de Barbara Taylor Bradford partagent de troublantes similitudes avec ceux de la série de Julian Fellowes. Parmi les exemples les plus frappants, notons une matriarche charismatique « qui aime tout régenter », une cuisinière passant son temps à aboyer sur la fille de cuisine tout en sachant faire preuve, sous ses airs bourrus, d'une tendresse maternelle ou encore une membre de la famille dévouée à la cause des suffragettes.

Si on retrouve donc bien les ingrédients de la série, force est de constater que le roman de Barbara Taylor Bradford ne tient définitivement pas la comparaison. Car malgré la tentative louable de l'auteure d'inscrire son oeuvre dans la lignée de Downton Abbey, le résultat tient incontestablement davantage de la caricature que d'un tour de force littéraire.

Alors que la quatrième de couverture laissait présager un récit historique plein de potentiel, « La splendeur de Cavendon Hall » s'apparente en réalité plus à une succession de clichés servie par des personnages sans profondeur et des dialogues parfois affligeants qu'à une intrigue historique un minimum plausible à défaut d'être de qualité.

D'entrée de jeu, il est ainsi clair que le souci de rigueur et de cohérence historique ne constitue pas la préoccupation principale de l'auteure qui, afin de servir son histoire, n'hésite pas à bafouer les codes de la hiérarchie sociale à travers les relations qu'entretiennent ses personnages. Si je ne mets pas en doute l'esprit de dévouement et le sincère attachement des Swann pour leurs maîtres, une telle proximité et familiarité entre les nobles et leurs domestiques semble en revanche peu crédible pour l'époque où est censée se dérouler l'histoire.

Par ailleurs, l'auteure qui ne s'embarrasse d'aucune description, occulte en conséquence presque totalement le contexte historique de son récit. La menace et les bouleversements engendrés par la première guerre mondiale ne sont que furtivement évoqués et souvent à travers des considérations sans réelle profondeur. La dimension historique ne constituant finalement rien de plus qu'un prétexte permettant d'offrir un bel écrin à son histoire sans jamais être un tant soit peu réellement exploitée.

Outre ces incohérences et ces maladresses sur les fondements même de l'intrigue, Barbara Taylor Bradford, en choisissant de privilégier l'action au détriment de la profondeur, peine également à convaincre quant à la solidité de son histoire et la justesse du ton employé.

Le destin semble clairement s'acharner sur les personnages qui enchaînent les drames et les déconvenues à un rythme effréné. A défaut d'être crédible, une telle succession de catastrophes a au moins le mérite de tenir le lecteur en haleine, se demandant sans cesse quel nouveau drame l'auteure réserve encore à ses personnages.

Mais si Barbara Taylor Bradford maîtrise incontestablement l'art des rebondissements et redouble d'inventivité dans le registre de la tragédie, elle manque en revanche de finesse dans l'appréhension de la psychologie de ses personnages.

La crédibilité de l'intrigue pâtit ainsi lourdement d'une écriture plus scénaristique que littéraire qui privilégie les rebondissements et les coups de théâtre au détriment de la justesse des émotions et de la qualité des dialogues.

A mesure que les évènements tragiques se succèdent, les réactions des protagonistes deviennent de moins en moins crédibles et totalement inadaptées aux situations auxquelles ils sont confrontés. Chaque épreuve est ainsi surmontée avec une facilité déconcertante quand elle ne connaît pas une issue relevant du « heureux hasard » (pour ne pas parler de miracle !).

Face à ce défilé sans fin de protagonistes et ces rebondissements à répétition, l'auteure ne prend finalement le temps de développer que très peu de ses personnages qui apparaissent, pour la grande majorité, stéréotypés et manichéens. La petite Dulcie, benjamine de la famille, étant finalement la seule qui aura réussi à me tirer un sourire de temps en temps et à réellement égayer ma lecture. Dès lors, le lecteur a toutes les difficultés à éprouver à l'égard de ces personnages de l'empathie et à s'investir dans une intrigue qui flirte hélas souvent avec les limites du ridicule.

L'ensemble contribue, au final, à donner au lecteur l'impression de lire le script d'une série télévisée à l'eau-de-rose ringarde reposant sur un scénario d'un dramatisme grotesque, servi par un mauvais jeu d'acteurs ainsi que des dialogues affectés. D'ailleurs, la liste figurant au début du roman et présentant les différents protagonistes de l'histoire ainsi que les relations les liant les uns aux autres, à l'image de ce que l'on peut voir dans les pièces de théâtre, renforce grandement cette impression.

Un sentiment de gâchis, compte tenu de l'idée de départ pour le moins prometteuse, que la fin ne parvient malheureusement pas à atténuer. On assiste au contraire à un florilège de rebondissements surréalistes et une surenchère de sentimentalisme niais dans les répliques. le roman s'achève sur une fin ouverte laissant présager une suite à l'histoire sans cependant réussir à instaurer une tension dramatique susceptible de donner envie au lecteur de lire la suite.

Un « Tome 2 » serait ainsi en cours d'écriture avec une publication prévue pour 2015 aux Etats-Unis… il va sans dire que ce sera sans moi.

* * *
Tentant de s'inscrire dans la lignée de Downton Abbey en réutilisant les ingrédients de la série à succès, « La splendeur de Cavendon Hall » tient au final malheureusement plus de la caricature que de la prouesse littéraire.
Le contexte historique, qui constitue pourtant un des principaux attraits de l'intrigue, se révèle ici purement anecdotique et ses rares tentatives d'exploitation peu convaincantes.
Dans un style relevant davantage du scénario d'un soap TV à l'eau de rose que d'un récit littéraire, Barbara Taylor Bradford peine à convaincre avec son intrigue enchaînant les clichés et sombrant constamment dans un sentimentalisme excessif.
Malgré le potentiel de l'histoire et un rythme soutenu, celle-ci est ainsi rapidement plombée par des personnages stéréotypés, aux réactions inappropriées et manquant de finesse psychologique ainsi que des dialogues aussi affectés que creux.
En dépit des nombreux rebondissements de l'intrigue, ces derniers ne parviennent malheureusement pas à faire oublier un style artificiel et peu naturel qui privilégie l'action au détriment de la justesse des émotions, empêchant le lecteur d'apprécier pleinement la tension dramatique des évènements ainsi que leurs enjeux.

Ma rencontre avec la plume de Barbara Taylor Bradford se solde donc malheureusement par une terrible déception. Néanmoins, je ne renonce pas à découvrir l'auteure avec un autre de ses romans.
Lien : http://lectriceafleurdemots...
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