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Critique de Stockard


Quand un livre se paye le luxe de débuter par une préface signée Donald Ray Pollock himself, 'savez ce gars débarqué d'on ne sait où et qui en à peine trois bouquins s'est hissé au niveau des plus grands auteurs de romans noirs (mais alors bien, bien noirs), on sait qu'on est devant une oeuvre qui, en bien ou en mal, va nous faire l'effet d'une bonne baffe dans la cafetière. Si en plus ladite oeuvre est publiée chez Monsieur Toussaint Louverture, sûrement la plus géniale des maisons d'édition actuelles (ici une pensée émue pour 13e Note Éditions qui, il y a peu encore, pouvait se targuer de faire concurrence), on prend son bouquin, sa cafetière et on s'agenouille devant un quelconque dieu d'osier avant d'ouvrir d'une main tremblante ce qui risque fort d'être LE livre de l'année.
Et ça traîne pas, en un rien de temps, nous voilà embarqué dans ce Jardin de Sable qu'est le Kansas des années 30. La Grande Dépression est passée par là et pour l'instant, rien n'a repoussé. C'est dans cette époque dantesque que naît Jack, fils de Wilma MacDermid et d'un suédois dont on n'aura pas le temps d'en savoir trop, poussé rapidement qu'il sera vers la sortie à l'occasion d'un accident de voiture plus comique que tragique. Jack se retrouve donc confié vite fait mal fait à ses grands parents maternels, Wilma désertant le foyer et son rôle de mère en vue d'approfondir les bases d'un métier pour lequel elle passera rapidos à un temps plein, métier connu comme étant le plus vieux du monde mais aussi et sûrement le plus dur. Pendant ce temps le petit Jacky poussera comme il peut (c'est à dire de traviole) entre appartements minables et caves puantes, et passera tant bien que mal ses minables premières années qui ne seront pourtant pas si dramatiques en comparaison de ce qui l'attend quand Wilma, doté d'un tout nouveau mari alcoolique et violent, viendra le chercher pour former ce qu'elle imagine être une vraie famille aimante. C'est dans cet environnement plus que perverti que Jack essaiera de se construire, s'accrochant à une seule idée-bouée : transformer son amour filial pour Wilma en amour physique.

Comment ne pas être dérangé par cette représentation nauséeuse d'un gamin portant le désespoir et la misère sur son dos rachitique, qui donnerait tout pour coucher avec sa mère, allant jusqu'à penser que sa vie en dépend ? On comprend vite ce qui a tant frappé Donald Ray Pollock dans la découverte de ce récit de l'Amérique des laissés pour compte – dont les limites de plus en plus floues finissent par disparaître dans le stupre, l'alcool et la violence – et le combat qu'il a mené pour qu'il soit de nouveau édité (parce que franchement, qui connaissait déjà Earl Thompson ?)

Brisant le tabou le plus dégueulasse qui soit, Thompson nous livre un moment de littérature pan-dans-la-gueule qui marque, qui fascine autant qu'il révulse et qui ne passe pas loin de se poser en référence du genre. A déconseiller aux âmes pudibondes, à celles refusant même d'imaginer que l'amour entre un fils et sa mère puisse se concevoir autrement que d'une seule et unique manière et à celles qui répugnent à suivre quelque chemin que ce soit s'il n'est pas balisé et fanalisé (quoi ?) au préalable...
A conseiller à absolument toutes les autres.
N'hésitez pas, cette fois on a eu de la chance mais il n'y aura peut-être plus jamais de réédition.
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