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Critique de babounette


Ivan Tourgueniev, Les Eaux printanières (1871)


Avec Les Eaux printanières (Вешние воды), fort proche thématiquement de fumées, Tourgueniev opère un virage vers le romanesque pur, délaissant les considérations sociales et politiques avec un roman autobiographique, puisqu'il déclare que c'est son histoire. le titre évoque poétiquement, et avec le pessimisme de Tourgueniev, l'immaturité affective et le passé, dont les erreurs ne peuvent être rattrapées. le roman commence d'ailleurs par l'exergue suivant, extrait d'une vieille romance russe: «Joyeuses années, Heureuses journées, Vous avez passé comme des eaux printanières».

L'action se passe surtout en Allemagne, là où vit Tourgueniev.

Dimitri Sanine, de petite noblesse, a désormais 52 ans. Solitaire, il se souvient amèrement de l'épisode de ses 22 ans qui a ruiné sa vie. Son amour pour Gemma était pur et prometteur, mais il a tout gâché à cause de sa faiblesse et d'un destin capricieux qui l'ont fait succomber au jeu cruel de Maria Nicolaïevna pour lequel il a un coup de foudre passager.

A l'époque, en 1840, le jeune Dimitri fait un petit héritage qu'il consacre à voyager en Europe. Rentrant en Russie par Francfort, il pénètre dans une boutique italienne, et y découvre la jeune fille de la maison, dont il apprendra avec déplaisir qu'elle est fiancée à un riche Allemand que la mère voit avec faveur car il pourrait renflouer la boutique, mais qui s'écoute beaucoup parler.

Quand Emilio, 14 ans, le jeune frère de Gemma, est pris d'un malaise, Dimitri a les gestes qu'il faut, est considéré comme son sauveur, et la famille reconnaissante lui demande de prolonger son séjour. Il aide au magasin, et on chante des airs de Manuel Garcia, le père de Pauline Viardot et de la Malibran. Dimitri se croit un jour obligé de défendre l'honneur de la jeune fille et provoque un duel contre un militaire un peu grossier avec elle, alors le fiancé est resté assez passif. Les adversaires ne veulent pas d'effusion de sang, tirent à côté, et se réconcilient. Gemma admire son héros, déjà amoureux d'elle, et délaisse bientôt l'Allemand pour le Russe après une scène d'une grande intensité psychologique, et ils décident de se marier. La jeune italienne adoptera la religion orthodoxe, et arrache de son cou une petite croix catholique en pierre précieuse qu'elle lui offre comme un gage. Pour se marier, il faut de l'argent. Dimitri décide de vendre ses terres de Toula, et investira l'argent dans la boutique. Mais le destin va bifurquer quand il rencontre son ami d'enfance, Hippolyte Polozov, venu à Francfort faire des emplettes pour son épouse, la séduisante et riche Maria Nicolaïevna, qui séjourne à Wiesbaden. L'ami lui propose de l'accompagner à Wiesbaden où il pourra négocier la vente de ses terres avec Maria. Ce que Dimitri ignore, c'est qu'Hippolyte ferme les yeux sur les aventures de sa femme, et que le couple décide même de faire un pari à la Cosi fan tutte. Maria est certaine de pouvoir séduire Dimitri tandis qu'Hippolyte parie le contraire, car Dimitri est trop amoureux de Gemma. Maria prétexte un délai pour examiner sa demande, et en profite pour l'inviter en l'absence de son mari, l'amener au théâtre dans sa loge, et lui faire des propositions de plus en plus précises. Même s'il est fiancé, «cela ne porte pas à conséquence». Un jour, Maria et Dimitri sont surpris par un orage dans les bois et doivent se réfugier dans une cabane, d'où ils ne sortent qu'après trois heures. C'est ainsi pudiquement que l'auteur apprend l'issue du pari au lecteur. Honteux, Dimitri écrit à Gemma qu'il ne reviendra pas, et lui avoue la vérité. Il devra vivre désormais dans le souvenir amer de ce bonheur manqué.

Trente ans ont passé. Dimitri revient à Francfort comme en pèlerinage, mais on ne rattrape pas le temps perdu. La boutique n'existe plus. Il réussit cependant à trouver l'adresse de Gemma à New York. Il lui écrit pour implorer son pardon. Elle répond en lui donnant de ses nouvelles. Sa mère est morte, Emilio aussi, sur les barricades, avec Garibaldi. Elle est mariée, et l'aînée de ses quatre enfants, dont elle joint la photo, va bientôt se marier. Dimitri retrouve la petite croix qu'il avait reçue de Gemma trente ans plus tôt, et l'envoie comme cadeau de mariage à la future épouse, portrait fidèle de la Gemma d'autrefois.

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