Quand je suis fatigué de heurter mon front aux barreaux, je le pose dans tes mains, et je sens la vigueur de tes lignes de chance.
Si tu croises un enfant, dis-lui : "Cours déconnecter leurs réseaux et crée des passages clandestins pour des yeux libres enfin."
Parfois j'habite un long prologue. Quelque chose comme une phrase bleue, encre jetée entre les îles. Peintre, je bave des merveilles. La nuit, j'ancre dans mon délire. Un ciel bleu-roi coule sous ma langue.
De moi, je sais de longues absences. Des ratés qui m'appartiennent et d'autres qui me sont venus d'eux-mêmes, sans forcer. Des objets, des phrases, toutes les gaucheries de l'existence.
Quelle sottise de croire les îlots humains compatibles.
Une fois, tu t'es endormie et j'ai regardé ton dos. Ce n'était pas comme quand tu t'éloignes. Il était pour une fois la preuve de ta présence, d'une sorte d'abandon. Je l'ai regardé longtemps. C'est un délit de haute confiance d'abandonner son dos au regard de l'autre. Le dos est une forme vraie, d'autres diraient une forme pure, contrairement au visage que l'on peut peindre et altérer comme les façades des maisons.
Un dernier verre. Ailleurs.
Ils cherchent dans la ville un bar.
Mais c'est une ville qui a peur.
Les riches s'enferment chez eux de peur que les pauvres ne leur demandent des comptes.
Les pauvres s'enferment chez eux parce qu'ils n'ont nulle part où aller.
Je suis parfois un phare éteint où tous les réfugiés du monde font un énorme brouhaha.
Il me coûte de réaliser à chaque lecture que je ne suis guère aussi seul que je l'avais cru.
Bêtement, l'homme a envie de
lui prendre la main.
Mais il a appris à ne prendre que
ce qu'on donne.