Citations sur L'homme craie (94)
La plupart d'entre nous ont fait des trucs moches à un moment ou à un autre, des trucs qu'on voudrait pouvoir effacer, qu'on regrette. On commet tous des erreurs. Nous avons tous le bien et le mal en nous. Lorsque quelqu'un se rend coupable d'une chose horrible, est-ce que cela efface tout le bien qu'il a fait dans sa vie ? Ou y a-t-il des actes si terribles qu'aucune bonne action ne peut les racheter ?
On croit vouloir des réponses. Mais en réalité ce que nous voulons ce sont les bonnes réponses. Nous posons des questions dont nous attendons en retour la vérité que nous voulons entendre. Le problème c'est qu'on ne peut pas choisir ses vérités. La vérité a cette habitude d'être simplement la vérité. Le seul choix que nous ayons, c'est d'y ajouter foi ou non.
- Qu'est-ce que c'est ?
(…)
- Ceci, dis-je en la dépliant soigneusement, est ce qu'on appelle une lettre. Les gens l'utilisaient comme moyen de communication dans les temps anciens.
Elle m'adresse un regard et un majeur pleins de mépris.
- Je sais que tu parles, mais tout ce que j'entends, c'est blablabla.
- C'est le problème avec vous autres jeunes. Vous n'écoutez pas.
Personne n'a jamais trouvé de réponse au fond d'une bouteille. Ce n'est pas le but, bien sûr. Le but, quand on vide une bouteille, c'est en général d'oublier les questions.
- Les amis, hein ? Plus d'emmerdes qu'ils ne le valent. C'est pire avec la famille, remarque.
- Possible, dis-je sans me mouiller.
- Oh, crois-moi. Avec les amis, on peut couper les ponts. Avec la famille, jamais. Elle est toujours là, en toile de fond, à te niquer le cerveau.
Je me demande s'il faut avoir eu une existence irréprochable pour devenir saint, ou si une vie de débauche rattrapée in extremis par quelques miracles est canonisable ? Ça semble être ainsi que la religion fonctionne. Assassine, viole, trucide, mutile, tout sera pardonné tant que tu te repens. Ça ne m'a jamais paru très juste. Mais bon, Dieu, comme la vie, est injuste.
Il y a des choses dans la vie que l'on peut influencer – le poids, l'apparence, même le nom -, mais d'autres sont immuables, peu importent les efforts que l'on consente. Ces choses sont celles qui nous façonnent. Celles sur lesquelles nous n'avons aucune prise.
On faisait comme si de rien n'était. C'est comme ça, les gosses. Rien ne reste. C'est plus dur, quand on est adultes.
Être adulte n'est qu'une illusion. À y réfléchir, je ne crois pas qu'aucun de nous le soit jamais devenu. On a simplement pris des centimètres et des poils. Je m'étonne parfois qu'on m'ait donné le droit de conduire, ou qu'on ne m'ait pas pincé pour consommation d'alcool au pub.
Sous le vernis de l'âge, sous les couches d'expérience qu'on accumule tandis que les années continuent leur avancée stoïque, nous sommes toujours des enfants, aux genoux écorchés et au nez plein de morve, qui ont besoin de leurs parents... et de leurs amis.
Je suppose que c'est la première fois que j'ai pris conscience de la versatilité des choses. Tout ce que nous tenons pour acquis peut nous être arraché en un instant.