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Citations sur Le ministère de la douleur (12)

Charles Bukowski, lui aussi, était au rendez-vous : de par son caractère rebelle, il leur en imposait, comme à tant d'autres générations. A leurs yeux, Bokowski était un type "cool", c'était une "pointure", un "mec canon", le représentant de la "vraie" littérature, la littérature qui a "des couilles".
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La langue était notre traumatisme commun, mais il se manifestait parfois sous une forme tout à fait pervertie. J'avais été bouleversée par le cas de cette jeune Bosniaque qui avait, dit-on, appris par cœur l'histoire de son propre viol et la répétait chaque fois qu'on la lui demandait. Lorsque ces viols de guerre s'étaient retrouvés sous le feu des projecteurs, il s'était avéré qu'elle était la seule capable d'en faire un récit cohérent. Très vite, elle avait donc été assaillie par les journalistes étrangers et les organisations féministes. Les féministes américaines l'avaient même invitée aux Etats-Unis. Là, elle allait de localité en localité, en dévidant la bande de son humiliation. De surcroît, on raconte qu'elle l'avait également apprise en anglais. Elle répétait son histoire, maintenant doublement aliénée de son contenu, telle une pleureuse qu'on engage dans les villages pour égrener les mérites d'un défunt. En contant son histoire affreuse, elle émoussait sa douleur.
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Nous sommes des barbares. Nous n'avons pas d'écriture, nous laissons notre signature dans le vent. Nous émettons des sons. Nous signons d'un cri, d'un bruit, d'un hurlement ou d'un crachat. C'est ainsi que nous marquons notre territoire. Nos doigts jouent du tambour sur tout ce qu'ils trouvent, les poubelles, les vitres, les tuyaux, le son du tambour proclame notre existence. Nous faisons du vacarme, notre vacarme est douloureux comme un mal de dent. Nous faisons les pleureuses pour les noces et les enterrements, et alors, les voix hululantes de nos femmes explosent en rafales sur les façades de béton. Nous cassons les vitres, l'explosion est notre affaire, les pétards sont notre distraction favorite. Le son est notre écriture, le bruit que nous produisons est la preuve unique de notre existence, les explosions la seule trace que nous laissons derrière nous. Nous sommes comme des chiens, nous aboyons, nous lançons nos aboiements vers le ciel bas et gris qui pèse sur nos crânes.
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J’observais les voyageurs, j’écoutais ce qu’ils disaient, même si je ne comprenais pas la langue, je flairais leurs odeurs, je laissais mon regard glisser sur leur visage comme sur un écran d’ordinateur et j’engrangeai dans ma mémoire des détails, oui, surtout des détails. Des images saisies par hasard me hantaient, plus ou moins longtemps. J’avais souvent l’impression que ce n’était pas moi qui leur avais ouvert la porte, mais quelqu’un d’autre.
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En nos langues, on égorgeait, on humiliait, on tuait, on violait et on expulsait. C'étaient des langues qui étaient entrées en guerre parce qu'elles se considéraient comme incompatibles, peut-être justement parce qu'elles étaient indissociables.
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J'ai entendu cent fois cette phrase : « Cette guerre n'est pas la mienne ! » Et, effectivement, ce n'était pas notre guerre. Pourtant, c'était bien la nôtre. Car si elle ne l'avait pas été, nous ne nous serions pas retrouvés ici. Mais si elle l'avait été, nous ne nous serions pas retrouvés ici non plus.
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Dans ce monde médiatisé tous azimuts, tout le monde était coupable. Le crime était irréel. Tout était irréel.
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Les réfugiés de Slavonie, des Croates, se sont dirigés vers Zagreb, puis vers l'Istrie et la mer. Les réfugiés de Bosnie se sont dirigés vers le sud, celui de la Croatie, ou vers l'est, à savoir la Serbie. Les Serbes de Croatie l'ont d'abord fuie en catimini, jusqu'au jour où on les a massivement chassés. Les Hongrois de Voivodine sont passés sans bruit en Hongrie. Où des Serbes allaient bientôt les suivre. Les Albanais du Kosovo ne tarderaient pas, eux aussi, à se mettre en route....
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"Je prononce un mot, mais je ne sens pas son contenu, je sens un contenu, mais je ne sais pas trouver le mot juste. Je me demande si l'on peut faire quoi que ce soit, raconter une histoire, par exemple, dans une langue défectueuse qui n'a pas appris à décrire la réalité, tant est complexe le vécu de la réalité intérieure."
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Mes étudiants, semble-t-il, avaient pris du retard, comme moi j'avais pris du retard, un retard d'une seconde, une seule seconde. Nous échangions des regards, nous restions bouche bée, nous avions laissé passer l'occasion de sauter dans les temps nouveaux. Nous n'avions plus qu'à courir de toutes nos forces si nous voulions rester sur place. Le virus des perdants avait déjà pénétré dans nos cœurs et affaiblissait nos muscles.
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