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Critique de PG35


Les mémoires de Renaud van Ruymbecke débutent par un rappel des événements qui ont conduit Robert Boulin au suicide – car c'est bien un suicide, contrairement à ce que certains journalistes tentent de nous faire croire en dépit du bon sens et de l'état actuel de la procédure.
Boulin s'est retrouvé piégé par Henri Tournet, un ancien résistant devenu un escroc notoire, qui lui a prétendument vendu un terrain de deux hectares à Ramatuelle tout en lui remboursant peu après le montant de la vente. En échange, Boulin intervient (sans succès) auprès du préfet pour obtenir que Tournet puisse faire lotir les parcelles attenantes. Incarcéré par van Ruymbecke pour avoir vendu deux fois les mêmes terrains, l'escroc menace Boulin de tout révéler. Les actes de procédure du juge confirment les uns après les autres que la vente du terrain n'était qu'un don déguisé, en dépit des dénégations et explications laborieuses du ministre. Quelques mois après la mort de son père, Bertrand Boulin avait écrit un livre (Ma vérité sur mon père) dans lequel il racontait minutieusement les derniers jours du ministre et faisait part de son anxiété grandissante à propos des développements de cette affaire.
Van Ruymbecke évoque plusieurs autres dossiers qu'il a instruits au fil des décennies 80 et suivantes. On perçoit nettement l'évolution de la justice sur cette période : on passe du blocage de certaines affaires sur ordre du procureur, c'est-à-dire du ministre de la Justice, à une liberté de plus en plus grande accordée aux juges. Même si Renaud van Ruymbecke a eu à subir la vindicte de Nicolas Sarkozy qui le soupçonne de mauvaises intentions dans l'affaire Clearstream. le juge sortira blanchi de la procédure disciplinaire demandée à son encontre. Peu rancunier, il blanchira l'ancien président dans l'affaire du « Sarkothon ».
L'affaire Urba (qui verra la condamnation d'Henri Emmanuelli) rappelle des pratiques dont on souhaite qu'elles soient d'un autre âge. van Ruymbecke ne fait pas de révélations fracassantes sur l'affaire Elf, hormis les montants démesurés des caisses noires de l'entreprise. Quels sont les bénéficiaires ultimes des commissions versées ? En-dehors du PDG et de deux cadres supérieurs (qui seront condamnés plutôt légèrement), on n'en sait trop rien. le problème de la traçabilité des versements en liquide est insurmontable.
Le juge évoque longuement les paradis fiscaux et l'argent sale. Il se montre sévère vis-à-vis des Pays baltes et de la Russie. Singapour, Hong Kong, Dubaï et le Liban sont décrits comme les pays protégeant le plus efficacement les fraudeurs.
Cela étant on reste sur sa faim à la lecture de ces mémoires. Ont-elles été écrites trop vite ? le livre est court, le ton est mesuré, les dossiers sont évoqués de manière synthétique… Il manque peut-être à l'auteur le sens du suspense. On s'attendait à des révélations, des anecdotes, des jugements caustiques, du spectaculaire. Rien de tout cela. Renaud van Ruymbecke cite abondamment des ouvrages de journalistes – dont certains écrits sur lui – plus que des témoignages recueillis. Sans doute s'agit-il d'un excès de discrétion ou d'intégrité. On attend un développement plus détaillé des affaires qui ont marqué sa carrière.
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