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Critique de Gepeoh


Nocturne du Pérou (BWV quelque chose)

Lecture extrêmement exigeante, où la violence règne sur un pays qui semble maudit : voué à la prostitution, à la sauvagerie, la perdition et la honte, au racisme et aux enlèvements de natifs ... à une forme de fascisme, inébranlable, fuligineux et suintant de la jungle et du désert. Une haine religieuse, politique et sociale qui gangrène un pays, celui-là même qui est le personnage du roman. Même quand on ne lui demande pas, Vargas Llosa nous le donne.

Ici, le récit se fait multiple, polyphonique, sur plusieurs temporalités. La structure est d'une merveilleuse complexité. Il y a trois (ou cinq, c'est selon) histoires principales, plusieurs temporalités, et tout est mélangé, ou plutôt agité.
Parce c'est que cherche à faire Vargas Llosa. le but n'étant pas d'épater la galerie en explosant la narration, mais d'en faire une matière qui se déforme et se reforme en permanence : humide (fluviale), aride (désertique), poisseuse (alcoolisée)...

Si le lecteur est maltraité, c'est parce que c'est tout ce (foutu) pays qui l'est. le bordel qui anime la vie de Piura la détruit par sa simple existence. Bientôt viendra le temps des torches, des maladies, des maitresses, captifs, aveugles, lépreux... et cet ensemble, à priori hétérogène, à priori le possible d'un roman linéaire, est essoré en permanence par la luxuriance de la jungle et la sécheresse de la ville. Par les rites des natifs et ceux des soldats violeurs natifs migrants fuyards contrebandiers, tout ce qu'à à proposer le livre en matière de personnages.

Est-ce que c'est pénible ? Ça l'est. le lecteur doit prêter attention à chaque moment, ne pas se laisser distraire par une putain un peu trop présente ou un brigand un peu trop bavard. Ce qui se passe est parfois plus sinueux.

Est-ce que c'est pénible (bis) ? Non. C'est une tornade. La Maison verte est au Pérou (ç'aurait pu être un autre pays latino-américain) ce que Absalon, Absalon ! (Faulkner) est au Dixieland. Même étrange individu qui vient construire une maison, mêmes questionnement autour de son origine, de ses moeurs, même mélange de temporalités et de pièges dans les constructions de phrases. Même type d'épopée de personnages "secondaires" (ici, une descente de fleuve), même constat.

La vie décrite dans le roman est tellement forte, tellement brutale, tellement vivante de par le génie de la construction et des descriptions (à la limite de l'odorama), qu'elle en devient un prurit équatorial, des salves continues d'abandon et de points d'accroche, de suffocations de soupirs et, souvent, de points d'orgue. Tonitruants. A répétition.
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