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Critique de alouett


Dans un coin perdu en France, un morveux, une nymphomane, une quinquagénaire prête à tout, un fermier autoritaire – violent et alcoolique -, une vieille souillon et une truie vivent en huis-clos dans une ferme.

Presque tous les éléments sont réunis pour qu'un drame ait lieu. Il ne manquait plus que l'élément déclencheur qui allait mettre le feu aux poudres : Jimmy Cobb. Ce dernier, célèbre truand américain, est en cavale avec le magot d'un casse. Il cherche à se dérober à la battue policière destinée à l'appréhender et atterrit dans la grange de cette ferme. Il n'aurait pas pu tomber plus mal…

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Après "Pauvres Zhéros" (Pierre Pelot), "Canicule" est le second roman que Baru adapte en bande dessinée. A l'occasion de cette sortie, Baru a accordé une interview à ActuaBD.

« À partir du moment où l'on envisage le monde comme il est, c'est à dire sans faux semblants, on est dans la proximité immédiate de ce qu'on qualifie de roman noir. Pourquoi est-il noir ? Parce qu'il parle aussi des choses qui ne vont pas ! Mes choix de départ en bande dessinée m'emmènent vers ce type de récit, souvent écrit par des gens qui me sont proches (…) » (lire la suite de l'interview sur ActuaBD).

Cette bande dessinée est une adaptation du roman éponyme écrit par Jean Vautrin (1982), roman qui avait déjà été adapté au cinéma en 1984 par Yves Boisset (avec Lee Marvin dans le rôle de Cobb).

La vision d'un homme qui marche en plein milieu d'un champ de blé nous assaille dès la première page. Accablé par le soleil, il semble lutter contre l'épuisement. On remarque dès lors l'illogisme de cette apparition d'un mec vêtu d'un costard-cravate errant en pleine campagne. Déjà, Baru vient titiller le lecteur en l'inondant d'une chaleur accablante, on ressent tout à fait la difficulté de cet homme à se mouvoir. Imaginez la scène qui suit et durant laquelle il enterre son magot !… sous le regard du petit morveux dissimulé derrière les épis de blé. Déjà, on investit ces personnages, intrigué et curieux de connaître la suite.

Le style de Baru est mordant. Graphiquement, son trait est incisif, agressif, il n'épargne pas les différents protagonistes : ils sont laids, grimaçants, leurs visages sont déformés par les rides d'expression et/ou marqués par les stigmates de l'alcool.

Deux univers totalement opposés sont amenés à s'entrechoquer : d'un côté, on est en présence d'un gang organisé, petits mafieux habitués à imposer leurs propres lois et passés maîtres dans l'art de la manipulation. de l'autre, une famille de péquenauds dans laquelle les alternatives sont limitées : se noyer dans l'alcool, sombrer dans la folie ou se soumettre à la loi du plus fort.

" Ici, personne ne raisonne comme vous en avez l'habitude. Vous serez obligé d'en passer par quelqu'un, sinon, vous êtes un mort sur pied ".

Le rapport de force est déséquilibré, les dés semblent pipés d'avance pourtant, les événements qui vont avoir lieu déstabilisent le lecteur et le pousse dans ses retranchements. On a l'impression d'être dans une véritable poudrière. Rien ici ne permet au lecteur de marquer une pause pour reprendre son souffle. le récit est mené tambours battants. Cette impression est renforcée par le découpage effectué où de nombreux passages muets accentuent le rythme de lecture et relatent des scènes d'ultra-violence. de plus, les personnages parlent peu, ils ne prononcent aucun mot affectueux ; leurs répliques sont cinglantes, la violence verbale fait partie de leur quotidien. A chaque fois que l'on se prend de compassion pour un personnage, il se révèle par la suite être la même ordure que les autres.

Dernier contraste important dans cet ouvrage : le choix des couleurs posées à l'aide de lavis. Leur présence est inespérée, presque rassurante, pour ce roman noir. Elles imposent – sur ce dessin nerveux et intuitif – les teintes chaudes d'une chaleur écrasante. Cela renforce l'impression que l'atmosphère est électrique et que les nerfs des différents protagonistes sont à vifs.

Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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