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Critique de Musa_aka_Cthulie


Ça ne me paraît pas une mauvaise idée d'avoir réuni dans un petit livre des textes issus d'anciens numéros de la revue L'Histoire, alternant entretiens et courts essais. Fallait-il en revanche ne donner la parole qu'à Paul Veyne pour aborder le sujet de la Rome antique ? Je n'en suis pas certaine, puisque ça ne donne accès au lecteur qu'à un seul point de vue sur le sujet - au titre par ailleurs assez racoleur.

Si j'avoue volontiers qu'au tout début de l'ouvrage, je ne voyais pas bien l'intérêt d'un entretien sur la carrière et la vie de Paul Veyne, j'ai vite été accrochée par son ton léger, avec un brin d'humour, mais reposant sur une sérieuse connaissance de la Rome antique. Ses sorties sur l'autoritarisme de l'Église chrétienne font sacrément du bien à une époque où l'on n'ose plus émettre une seule critique sur tout ce qui touche au religieux !

De ces entretiens et des ces articles se dégage une image assez juste de l'antiquité romaine - et d'abord parce que Paul Veyne s'attache à définir ce qu'est un Romain, dans toute sa spécificité. Car Rome est multiple : c'est une cité, un ensemble de cités, un territoire de plus en plus large (puis de plus en plus réduit), un Empire comportant de multiples provinces. Un esclave, une femme, un enfant, un pérégrin peuvent-ils être considérés comme Romains ? de texte en texte, Paul Veyne nous donne à comprendre à quelle société profondément inégalitaire nous avons affaire. Il explique aussi très bien combien la religion dans la société romaine était éloignée de la conception que nous pouvons en avoir aujourd'hui, ou même de la conception chrétienne de l'époque. de même pour la justice. On saisit également assez bien les concepts de clientélisme et d'évergétisme, tellement importants pour cette société. Donc, pour l'essentiel, la civilisation romaine se dévoile à nos yeux de façon plutôt objective.

Reste que les textes en questions datent parfois d'une trentaine d'années et que Paul Veyne m'a l'air parfois plus intéressé par la pure spéculation intellectuelle que par le suivi des découvertes archéologiques en matière d'antiquité romaine. Il se laisse parfois un peu aller et, franchement, les textes sur les gladiateurs m'ont semblé un rien fantaisistes par moments. J'y voyais plus la marque des tableaux - superbes dans leur mise en scène, mais historiquement contestables - de Jean-Léon Gérôme que celle des historiens et archéologues qui travaillent sur le sujet. Non, Paul Veyne, les armures des gladiateurs ne pesaient pas forcément trente tonnes, et celles qu'on trouve exposées dans les musées - comme dans la vitrine des gladiateurs du Louvre - sont des armures d'apparat, et non réservées au combat. Et non, Paul Veyne, les jeux du cirque ne se limitaient pas aux combats de gladiateurs et aux exécutions de condamnés. Ils présentaient aussi des chasses, non pas, comme le dit l'auteur, où le lion mangeait la plupart du temps le chasseur, mais où des dizaines de milliers d'animaux furent massacrés. Et la mortalité des gladiateurs n'est peut-être pas aussi élevée que Paul Veyne nous le laisse entendre, sauf à la fin de l'empire, avant leur interdiction, où les combats étaient devenus, effectivement, de vraies boucheries. D'ailleurs, il y a loin de l'organisation d'un combat de gladiateurs dans une petite cité de Gaule romanisée à celle de la capitale. Or Paul Veyne ne s'intéresse guère, dans ce cas, qu'à Rome elle-même.

Je n'ai pas trouvé un intérêt énorme aux textes sur le mariage la sexualité, et, pour un ouvrage dont le titre est consacré au pouvoir, je suis étonnée que rien ne se rapporte aux sénateurs. Donc, quelques lacunes, quelques approximations fantaisistes qui demandent à rester sur ses gardes durant la lecture, mais une approche générale assez intéressante et juste de la société romaine, dans un style agréable - lire Paul Veyne, c'est plutôt agréable et amusant.



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