Par le biais de ses nouvelles, j'aborde pour la première fois l'écrivain catalan
Enrique Vila-Matas, suite aux billets enthousiastes d'une amie babeliote.
Dés la première, « La Houle », je suis sous le charme, une prose intelligente et espiègle, d'un humour décalé. Matas joue à entremêler le réel et la fiction, cette fine ligne de démarcation entre la littérature et la vie dont il se délecte, et nous avec.
Il poursuit avec « Villa Mirador », un homme qui devient du jour au lendemain “plus personne”, et se confie au téléphone à notre narrateur, choisi au hasard dans l'annuaire. Non, ce n'est pas de la SF ou du fantastique, beaucoup plus subtil, le charme fou des identités interchangeables.....
Dix-huit récits inégales en longueur, plus ou moins “noirs”, imprégnés de folie, où le suicide est souvent au rendez-vous et l'ombre de Franco s'y reflète de temps en temps. le
tout servi d'une intrigue dont la structure aérienne, réjouit, amuse et fait réfléchir. Mes préférés étant, “
Dante t'envoie le bonjour”, un bonjour qui va coûter cher, “Le vampire amoureux”, Nosferatu brisé et en extase devant la beauté du mal parfait, “Souvenirs inventés”, sublimes réflexions sur la Vie, le métier d'écrivain et la littérature, et “La modestie”, les mémoires d'un voleur de phrases d'autobus. Mais je ne peux, ne pas mentionner la nouvelle avec
Sophie Calle, “ Parce qu'elle ne l'a pas demandé “. Calle, voulant simplement changer de vie, demande à Vila-Matas, « .....toi, tu écris une histoire et moi, je la vis. », une aventure rocambolesque dans les dédales de l'imagination.
Les amateurs d'action doivent ici passer leur chemin. Ces histoires sur la vacuité et le tragique de l'existence ne mènent nul part, pourtant on s'y accroche comme une moule à son rocher. Une première lecture de Vila-Matas qui me fait penser aux tableaux de Magritte ( même les titres des tableaux et ceux des nouvelles sont dans la même veine), tous les ingrédients y sont: l'humour décalé, l'absurde, le trompe l'oeil...inutile de chercher la réalité derrière, elle n'existe pas, derrière c'est l'immense vide de notre condition mortelle......pour autant aucune tristesse.
“....je ne voulais pas faire un pas de plus dans l'abîme du vide et passer de la littérature à la vie. Plus encore, je ne souhaitais pas laisser mon écriture dans ce trou ténébreux qu'on appelle la vie.”